En quelques heures, il a fait voler en éclats la campagne Benjamin Griveaux. Piotr Pavlenski, un artiste russe aux méthodes radicales, a revendiqué être à l’origine de la diffusion de vidéos intimes du désormais ex-candidat LREM à la mairie de Paris. A 35 ans, cet activiste n’en est pas à son premier coup d’éclat. Il s’était fait connaître en défiant régulièrement les autorités russes, avant d’obtenir l’asile politique en France il y a trois ans, en mai 2017. Mais il a cette fois franchi un cap supplémentaire. Europe 1 dresse le portrait de cet homme aux méthodes controversées.
"Dénoncer l’hypocrisie" de Benjamin Griveaux
La déflagration est partie d’un site internet peu connu, qui a diffusé mercredi soir deux vidéos intimes et des messages équivoques attribués à Benjamin Griveaux et adressés à une femme qui n’est pas son épouse. Le texte, accompagnant l’article, est signé d’un certain "Piotr Pavlenski". L’activiste russe a revendiqué dès jeudi soir être à l’origine de la publication, alors que la vidéo se propageait sur les réseaux sociaux et que la rumeur enflait dans les rédactions. Il a expliqué son geste, dans un entretien téléphonique au journal Libération, par sa volonté de "dénoncer l’hypocrisie" de Benjamin Griveaux.
"C'est quelqu'un qui s'appuie en permanence sur les valeurs familiales, qui dit qu'il veut être le maire des familles et cite toujours en exemple sa femme et ses enfants. Mais il fait tout le contraire", affirme-t-il au quotidien, précisant avoir obtenu cette vidéo, qui date d’il y a "deux ou trois ans", d’une "source qui avait une relation consentie avec Benjamin Griveaux".
Réfugié en France après avoir défié les autorités russes
Piotr Pavlenski n’en est pas à son premier coup d’éclat. Avant d’élire domicile à Paris, il s’était fait connaître pour ses performances radicales en Russie, n’hésitant pas à défier le régime de Vladimir Poutine. En 2012, il s’était cousu les lèvres en soutien aux Pussy Riot, le collectif féministe dont les membres avaient été condamnées à deux ans d’emprisonnement en camp de travail. Un an plus tard, il marquait encore plus les esprits en se clouant les testicules sur les pavés de la place Rouge, à Moscou. Suivront d’autres performances tout aussi spectaculaires et dangereuses, comme quand il s’enroule nu dans du fil barbelé, ou quand il se coupe une partie de l’oreille droite.
Son art, qu’il revendique "politique", lui a valu plusieurs condamnations en Russie. Il a ainsi passé sept mois en détention, en 2016, pour avoir arrosé d’essence et incendié les portes de la Loubianka, le siège historique du KGB (désormais FSB, les services de renseignement russes). Piotr Pavlenski quitte finalement Moscou quelques mois plus tard, avec son ex-compagne Oksana Chaliguina et leurs deux enfants, à la suite d’accusations de violences sexuelles sur une jeune actrice. Le couple, qui trouve refuge à Paris, obtient finalement l’asile politique en France en mai 2017.
Piotr Pavlenski lors de sa performance à Moscou, où il avait incendié la porte des services de renseignement russes. NIGINA BEROEVA / AFP
Un artiste aux méthodes contestées
A peine installé dans la capitale française, Piotr Pavlenski se signale par un nouveau tour de force. En octobre 2017 il incendie la façade d’une succursale de la Banque de France, pour dénoncer la présence de l’établissement sur la place de la Bastille, à Paris. Condamné à trois ans de prison, dont deux ans avec sursis, il a repris du service ces derniers jours pour mener son nouveau "combat" contre Benjamin Griveaux. L’activiste avait au préalable demandé conseil à l’avocat d’extrême gauche Juan Branco, dont il s’est rapproché ces derniers mois.
Avant de publier sur Internet les vidéos de l’ex-candidat LREM, il avait également sollicité Mediapart. Le site d’investigation en ligne, qui a raconté dans un article avoir été approché par l’activiste, a refusé toute publication, dénonçant au passage "une atteinte manifeste à la vie privée".
Piotr Pavlenski risque désormais de nouveaux démêlés avec la justice française. La diffusion de vidéos intimes sans le consentement de leur auteur, le "revenge porn", est en effet passible de deux ans d’emprisonnement et 60.000 euros d’amende. Pas de quoi dissuader l'activiste, qui a prévenu dans une interview sur BFMTV : "Benjamin Griveaux est le premier participant de ce site. Cela va donc continuer".