La photo est belle, les sourires éclatants. Najat Vallaud-Belkacem, Benoît Hamon et Vincent Peillon ont ouvert, lundi matin au Palais Brongniart, les "Journées de la refondation de l'école de la République". Devant quelque 2.000 acteurs du secteur, les trois ministres successifs de l'Éducation nationale du quinquennat Hollande sont venus défendre les différentes mesures enclenchées depuis que la gauche est au pouvoir. Mais si ce n'est un poste occupé (plus ou moins longtemps) rue de Grenelle et une étiquette socialiste, qu'y a-t-il de commun entre Najat Vallaud-Belkacem, Benoît Hamon et Vincent Peillon ? Pas grand chose.
Chacun défend son bilan. En dépit de la volonté de défendre la "cohérence" des politiques éducatives, chacun s'est donc concentré sur son propre bilan. À Vincent Peillon, qui a déroulé un discours de 45 minutes au lieu des 10 qui lui étaient imparties, la morale laïque et les rythmes scolaires. Benoît Hamon, lui, peut se targuer d'avoir posé la question d'une réforme du système de notation. Quant à Najat Vallaud-Belkacem, elle a mis sur les rails la réforme du collège, dont l'entrée en vigueur est prévue en septembre prochain. Et milite activement depuis son arrivée rue de Grenelle pour une revalorisation salariale des enseignants en écoles maternelles et élémentaires, que le Premier ministre, Manuel Valls, devrait entériner mardi.
Ultime preuve que les divergences restent vives derrière les poignées de main : Benoît Hamon n'a pu retenir une énième critique contre la loi El Khomri pendant son intervention, rapporte le journal L'Opinion. "La société que nous préparons avec la loi Travail par exemple, peut réduire à néant tous les efforts faits pour l'éducation", a lancé le député, qui devrait s'esquiver avant l'arrivée de François Hollande, prévue lundi soir.
La fronde de Benoît Hamon. Alors que la loyauté de Najat Vallaud-Belkacem, fidèle parmi les fidèles de l'exécutif, n'a jamais été prise en défaut, c'est loin d'être le cas de Benoît Hamon. Celui-ci a été débarqué du gouvernement fin août 2014, sans même avoir eu le temps de faire une rentrée scolaire. Cinq mois à peine après avoir été nommé à l'Education nationale, il s'opposait publiquement à la ligne politique de Manuel Valls. Depuis, celui qui a retrouvé son poste de député des Yvelines ne perd pas une occasion de prendre ses distances avec le gouvernement, fustigeant tant la déchéance de nationalité que la loi Travail. L'élu a même raillé sur Twitter les sorties régulières d'Emmanuel Macron, estimant que lui-même avait été remercié pour moins que ça.
A lire les déclarations quotidiennes de @EmmanuelMacron, je me dis qu'à côté, la "cuvée du redressement" c'était en fait de la petite bière.
— Benoît Hamon (@benoithamon) 22 avril 2016
Surtout, Benoît Hamon ne cache pas ses ambitions pour 2017. Lui qui réclame une primaire à gauche à corps et à cris a d'ores et déjà annoncé qu'il serait "probablement candidat" si l'élection interne devait être organisée.
Vincent Peillon reconverti en auteur de polar. Enfin, si Vincent Peillon, ministre de l'Éducation nationale jusqu'en mars 2014, ne s'est jamais opposé frontalement à l'exécutif, il a pris ses distances avec la politique nationale, préférant désormais se consacrer à son poste d'eurodéputé et ses premières amours, la philosophie. Redevenu professeur dans une université Suisse, il a également publié un polar, Aurora, dans lequel il est question de guerre énergétique et de services secrets israéliens.
Les divergences sont donc nombreuses derrière l'opération de communication. Et il faudra plus qu'une photo des trois (ex-)ministres au Café du Croissant, théâtre de l'assassinat de Jean Jaurès en 1914, pour le faire oublier.
Rencontre au Café du Croissant avant le lancement des journées de la #RefondationEcolepic.twitter.com/8G6CYZclRe
— JeanBaptiste Prévost (@jb_prevost) 2 mai 2016