Deux mois pour permettre de faire remonter les préoccupations des Français. C'est le sens du "grand débat national", lancé par Emmanuel Macron à partir de mardi et qui va durer deux mois. Avant ce moment-clé du quinquennat, le chef de l'État a reçu lundi après-midi une quinzaine de maires ruraux, qui lui ont transmis les doléances exprimées par leurs administrés ces dernières semaines. "Il a été très attentif à ce qu'on pouvait dire", a expliqué lundi soir sur Europe 1 Vanik Berberian, président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF).
Un apport "utile" à Macron, veut croire Berberian. "C'est important pour lui d'avoir un retour de terrain qui soit différent de celui qu'il a habituellement par les préfets ou par les responsables de son parti. Nous, nous apportons un regard totalement détaché de la politique politicienne et on parle de la vie quotidienne des gens. Dans la réflexion qui s'impose au président de la République, l'apport qu'on peut avoir est quelque chose qui doit être utile pour lui", a insisté le maire de Gorgilesse-Dampierre, petite commune de 290 habitants située dans l'Indre.
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Ces doléances, avant le début du "grand débat national", ont les maires au cœur du jeu politique. "C'est vrai que, ces derniers temps, le gouvernement nous avait un peu négligés, comme les élus en général et les corps intermédiaires", analyse Vanik Berberian. "Mais le rôle du maire est toujours très présent dans l'esprit de nos concitoyens."
Une mise en garde adressée au gouvernement. À ce titre, l'édile a mis en garde Emmanuel Macron sur le risque d'une grande consultation nationale sans suites politiques. "Consulter les Français, c'est bien, mais si c'est pour leur dire 'je vous ai compris et entendu' et qu'il n'y a aucun débouché, ça posera un problème. Ce serait vraiment une très mauvaise idée que de laisser tous toutes ces contributions lettre morte."
Faut-il pour autant fixer des lignes rouges, comme sur l'ISF (Impôt de solidarité sur la fortune), ainsi que l'a indiqué Emmanuel Macron dans sa lettre aux Français publiée dimanche ? "Il faut absolument libérer la capacité d'agir, de choisir les thématiques et de ne pas rester prisonniers des thèmes qui sont proposés par le gouvernement, même s'il y a des sous-thèmes dans lesquels on peut faire intervenir une diversité de choses", estime le maire rural. "Il faut véritablement que cette parole soit libre."
"Surpris" du succès des cahiers de doléances. Le président de l'AMRF reste néanmoins optimiste sur la tenue de ce débat annoncé par le chef de l'État le 10 décembre dernier. "Un Français sur deux à l'intention de participer, c'est plutôt une bonne nouvelle", estime-t-il. "[Pour les doléances], on a été très surpris de voir que beaucoup de communes se sont associées à l'idée. On a vu beaucoup de monde se déplacer, donc on a recueilli plusieurs milliers de contributions. Les gens ressentent le besoin d'exprimer les choses."
Le pouvoir d'achat au cœur des revendications. Pour le contenu de ces revendications, Vanik Berberian évoque la colère profonde venue du monde rural. "Il faut se souvenir que ce mouvement a commencé avec le projet de taxe supplémentaire sur les carburants. Quand vous n'avez pas d'autres possibilités que de prendre la voiture, le fait de se retrouver taxé est très mal perçu, d'autant que ça venait s'ajouter à la séquence des 80 km/h qui n'est pas bien passée non plus." Ces sujets liés au pouvoir d'achat devraient logiquement émerger dans les débats qui se tiendront jusqu'à la mi-mars, date à laquelle Emmanuel Macron débutera l'analyse des contributions venues de la France entière.