La derrière ligne droite de la campagne de la primaire va-t-elle se jouer sur les questions sociétales ? Mardi matin, Alain Juppé, invité d’Europe 1, a appelé François Fillon a clarifier sa position sur l’avortement, rappelant que l’ex-Premier ministre de Nicolas Sarkozy, qui a reçu le soutien de Sens commun, avait, lors d’un meeting, regretté d’avoir écrit dans son livre que l’avortement était "un droit fondamental". "Jamais je n'aurais pu penser que mon ami Alain Juppé tombe aussi bas", a répliqué François Fillon depuis un déplacement à Viry-Châtillon. "Est-ce qu'une seule fois j'ai pris une position contraire à l'avortement ?", a-t-il encore lancé.
"À titre personnel". "Je suis très choquée de la manière dont se déroule cette campagne. Je comprends qu’Alain Juppé, qui a caracolé en tête, soit marri de voir que François Fillon est arrivé, avec 44% des votants, en tête dimanche", a commenté Valérie Boyer, porte-parole de François Fillon, et invitée mardi d’Europe Midi. La députée des Bouches-du-Rhône dénonce une attaque "vile" contre son poulain. "Les choses n’ont pas besoin d’être clarifiées alors qu’elles ne sont pas assombries. Il n’y a aucun sujet sur l’avortement pour François Fillon", a-t-elle fait valoir, estimant que le candidat a formulé, sur l’avortement, une position uniquement personnelle. "Quand François Fillon s’explique a titre personnel, c’est son droit, c’est son choix. C’est un homme d’Etat, il fait la différence entre ce qu’il pense sur le plan personnel et la manière dont il agit", assure-elle.
Un sujet qui inquiète les électeurs. "Ce n’est pas Alain Juppé qui a ouvert cette thématique, ce sont les réseaux sociaux qui s’en sont inquiétés", relève de son coté, également au micro d’Europe Midi, Fabienne Keller, porte-parole du maire de Bordeaux. Pour elle, François Fillon ayant été moins médiatisé en début de campagne que des candidats comme Alain Juppé ou Nicolas Sarkozy, une partie de ses positions a pu échapper aux Français. "François Fillon a dit qu’il était opposé à titre personnel à l’avortement. C’est un droit fondamental […], nous le savons, tellement important pour beaucoup de jeunes femmes qui n’ont pas accès au contrôle des naissances", fait valoir la sénatrice du Bas-Rhin.
L'épisode des "Jupettes". "Je rappelle que quand François Fillon était ministre, il a nommé des femmes à de grands ministères. Quand François Fillon était Premier ministre, c’est lui qui a fait la loi sur l’égalité des femmes dans l’entreprise. Quand il est candidat, il fait un programme pour les femmes !", rétorque Valérie Boyer. "Et que je sache, ça n’est pas François Fillon, lorsqu’il était Premier ministre, qui a viré toutes les femmes de son gouvernement", lâche-t-elle en référence aux "Jupettes", ces ministres femmes entrées dans le premier gouvernement d’Alain Juppé en mai 1995, et dont la plupart n’ont pas été reconduites lors d’un remaniement quelques mois plus tard.
Le mariage pour tous et l'adoption. Sur le mariage homosexuel, Fabienne Keller a également rappelé la position de François Fillon, souhaitant réécrire le volet sur l’adoption, quand Alain Juppé ne souhaite pas retoucher à la loi. "Il ne veut pas rouvrir ce débat qui a été beaucoup trop long. [..] Ça a libéré des paroles qui n’auraient jamais dû être divulguées, chacun doit être respecté dans sa sexualité", estime l’ancienne maire de Strasbourg.
"François Fillon a toujours dit qu’il était pour le mariage de deux hommes et de deux femmes, qu’il reconnaissait l’amour entre deux hommes et deux femmes, et qu’il ne reviendrait pas sur le mariage. En revanche, pour la filiation, il a dit qu’il fallait réécrire un certain nombre de choses, parce que l’enfant est toujours le produit d’un homme et d’une femme", rappelle de son côté Valérie Boyer. "Dans la mesure où l’enfant est toujours issu d’un homme et d’une femme, il n’y a aucun problème pour l’adoption simple, mais l’adoption plénière sera réservée aux couples hétérosexuels", déclare-t-elle.
Au fait, qu'a dit François Fillon sur l'avortement ? Le 22 juin à Aubergenville (Yvelines) lors d'une réunion publique, François Fillon déclarait : "J'ai écrit (dans mon livre) que l'avortement était un droit fondamental. Ce n'est pas ce que je voulais dire. Ce que je voulais dire, c'est que c'est un droit sur lequel personne ne reviendra. Philosophiquement et compte tenu de ma foi personnelle, je ne peux pas approuver l'avortement." Le 20 octobre sur France 2, interrogé sur le sujet, il répondait: "Je n'ai pas à m'expliquer sur mes convictions religieuses. Je suis capable de faire une différence entre ces convictions et l'intérêt général (...). Bien sûr que non" il n'est pas favorable à une interdiction de l'avortement.