C'est un tabou, et pourtant les troubles de l'érection touchent beaucoup plus de personnes que l'on ne pourrait croire. "Quand on regarde une foule de 1.000 hommes, 100 n'ont pas d'érection suffisante pour avoir un rapport sexuel satisfaisant", confirme au micro d'Europe 1 Eric Allaire. Invité de "Sans Rendez-vous", ce chirurgien vasculaire, membre de l’Académie Nationale de chirurgie et par ailleurs auteur du "Guide de l’impatient, les maladies de l’érection", revient sur les principales causes, la détection et les solutions aux troubles de l'érection.
Ce n'est pas une maladie, mais un symptôme
Le premier point sur lequel appuie Eric Allaire est qu'un trouble de l'érection "n'est pas une maladie mais un symptôme". "C'est comme aller chez un médecin et dire 'ma fille tousse', il faut comprendre pourquoi. Et pour cela, il faut avant tout connaître le mécanisme derrière l'érection. "Imaginez un ballon. Vous voulez le gonfler et qu'il soit dur pour le match. Vous avez une pompe, les artères, qui amènent le sang dans les corps caverneux, deux cylindres parallèles qui constituent l'essentiel du pénis. Une fois le match terminé, une vidange se fait via les veines. Mais chez certains patients, il y a des fuites et cette vidange est permanente. Donc vous gonflez le ballon, mais il n'est jamais dur."
Quant à l'arrivée du sang dans les artères, elle est provoquée par le désir, mais peut aussi être "automatique". C'est l'origine des érections matinales ou nocturnes décorrélées de l'appétit sexuel. Et si ce fonctionnement est "un mystère", avoue le spécialiste, il avance que l'idée derrière ce mécanisme, innée chez la plupart des hommes, est équivalent à "l'entretien d'une machine". "Il faut de temps en temps déployer tout le système, c'est un peu comme l'entrainement pour un sportif."
La disparition des érections matinales, le signe d'alerte
D'ailleurs, la disparition de ces érections matinales constitue un signal d'alerte. Car non contentes d'être "le signe du bon fonctionnement du système érectile, elles sont aussi probablement une preuve d'une bonne santé de manière générale" chez les hommes avance-t-il. Et s'il ne faut paniquer lorsque rien ne se produit un matin, le professeur Eric Allaire estime qu'au bout de trois mois, une consultation devient nécessaire. En fonction des cas, le patient se verra alors proposer une solution adaptée. Mais le chirurgien prévient que "l'examen clé" est l'échographie doppler du pénis, qui permet de voir l'entrée et la sortie du sang dans les corps caverneux et donc de voir s'il y a des fuites.
La cause d'un trouble érectile peut aussi trouver son origine dans un manque de testostérone. Et dans ce genre de cas, prendre du viagra n'est pas efficace. C'est pour cela que la célèbre "petite pilule bleue" se révèle sans effet chez "30% des patients atteints de troubles érectiles".
Ces troubles peuvent apparaître à tous les âges
Si l'image d'Épinal associe le trouble érectile au grand âge, il n'en est rien, poursuit Eric Allaire. "Dans mon cabinet, mes plus jeunes patients ont 18-20 ans, et il faut savoir que certaines études suggèrent qu'1% à 4% des hommes de moins de 25 ans n'ont pas d'érection suffisante pour permettre un rapport sexuel." Un symptôme qui provient "une fois sur deux" de fuites veineuses et qui peut être le premier signe de maladies bien plus graves, puisqu'"un problème d'érection qui se prolonge chez un homme de 30-40 ans est l'annonce de problèmes de santé futurs, comme des infarctus du myocarde ou des AVC".
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Du traitement médicamenteux à la chirurgie
Pour permettre aux patients de vivre ou de retrouver une vie sexuelle, plusieurs techniques existent. Tout d'abord, les injections caverneuses : un médicament qui va dilater les artères et qui s'injecte directement dans le pénis. Mais dans le cas des fuites veineuses, il faut passer par la microchirurgie. "On ligature toutes les petites veines dans cet espace très compliqué", résume le spécialiste.
Dans tous les cas, Eric Allaire invite à éviter les médicaments vendus sur des sites internet non officiels, et rappelle que les "remèdes miracles ne fonctionnent pas". Se voulant rassurant, il affirme également que dans "95% des cas", la médecine a une solution contre les troubles de l'érection.