Des traces de perturbateurs endocriniens, des polluants qui perturbent le système hormonal, ont été retrouvées chez quasiment toutes les femmes enceintes au cours d'une étude de Santé Publique France publiée mercredi, la première de cette ampleur qui a porté sur plus de 4.000 femmes. La concentration de ces substances était toutefois en légère baisse par rapport à des études antérieures, une évolution qui peut s'expliquer par les mesures de restriction et d'interdiction prises ces dernières années, estime l'agence française de santé publique.
Des substances "cancérigènes avérés ou suspectés". "Le bisphénol A, les phtalates, les pyréthrinoïdes (famille d'insecticides), les dioxines, les furanes, les PCB, les retardateurs de flamme et les composés perfluorés sont mesurés à des niveaux de concentrations quantifiables chez près de la totalité des femmes enceintes", explique l'agence, mandatée par le ministère de la Santé pour réaliser cette étude. Ces substances "sont des perturbateurs endocriniens" (des substances étrangères à l'organisme qui imitent les hormones naturelles ou interfèrent avec le système hormonal) et "pour certains, des cancérigènes avérés ou suspectés", rappelle Santé Publique France.
Des répercussions sur la grossesse ? Les femmes enceintes constituent une population particulièrement sensible car "l'exposition prénatale à ces polluants est soupçonnée d'avoir des répercussions sur la grossesse (prématurité, malformations congénitales, diminution du poids de naissance) ainsi que sur le développement et la santé ultérieure de l'enfant (atteintes du système reproducteur, du métabolisme, du développement psychomoteur et intellectuel et augmentation du risque de cancers)", ajoute l'organisme public.
Bisphénol A retrouvé chez 70% des femmes. L'agence a testé la présence de ces substances dans l'urine de plus de 4.000 femmes ayant accouché en 2011 en France métropolitaine. Elle a ensuite dosé leur concentration sur un panel allant de 208 à 1.764 femmes selon les molécules. Le bisphénol A, utilisé dans la fabrication de certains plastiques et résines et partiellement interdit en France depuis 2010, a ainsi été retrouvé chez plus de 70% des femmes. Et la quasi totalité - 99,6% - présente des traces de phtalates, qui entrent dans la composition de nombreux produits de consommation courante (emballages alimentaires, produits cosmétiques, produits d'entretien, peintures…).
La totalité des 208 femmes testées pour les dioxines, les furanes et les polychlorobiphényles (PCB) présentait "un niveau de concentration quantifiable pour au moins une de ces substances". Ces composants chimiques aujourd'hui interdits persistent très longtemps dans l'environnement et s'accumulent dans les tissus de ceux qui les ingèrent, en particulier les poissons. "Les concentrations mesurées (...) sont généralement légèrement inférieures à celles observées dans les études antérieures françaises et étrangères", souligne toutefois Santé Publique France. Selon elle, ces diminutions "pourraient s'expliquer en partie par la mise en place de réglementations (atrazine, dioxines, furanes) et par des réductions d'usages liées aux évolutions industrielles (bisphénol A, certains phtalates et pesticides organophosphorés)".