L'Humanité menace son propre bien-être en surexploitant la planète et en provoquant un déclin de la faune et de la flore dans toutes les régions du monde, confronté à une extinction majeure d'espèces, la première depuis la disparition des dinosaures, selon une vaste enquête scientifique révélée vendredi. Durant trois ans, plus de 550 chercheurs ont travaillé bénévolement sur ces évaluations régionales, qui synthétisent les données d'environ 10.000 publications scientifiques. Le résultat final couvre la quasi-totalité de la Terre. Ils en ont rédigé des synthèses d'une trentaine de pages chacune, négociées mot par mot, pour orienter les dirigeants en matière de protection de la biodiversité.
Plus de poissons en Asie d'ici 2050. "Nous sommes en train de saboter notre propre bien-être à venir !", a déclaré Robert Watson, président de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), à l'origine de cette enquête. Si rien n'est fait pour enrayer la tendance, la ressource en poissons de la région Asie-Pacifique sera ainsi épuisée d'ici 30 ans et jusqu'à 90% de ses coraux gravement détériorés d'ici 2050. En Afrique, ce sont plus de la moitié des espèces d'oiseaux et de mammifères qui seront perdues d'ici 2100, avertit cette étude compilée pour l'IPBES dans quatre énormes rapports régionaux.
Tendance alarmante. "La biodiversité -l'indispensable variété des formes de vie sur la Terre- continue à décliner dans chaque région du monde, réduisant significativement la capacité de la Nature à contribuer au bien-être de la population. Cette tendance alarmante menace des économies, des moyens de subsistance, la sécurité alimentaire et la qualité de vie des populations partout" dans le monde, soulignent ces rapports longs de 600 à 900 pages. En Europe et Asie centrale, "la population de la région consomme plus de ressources naturelles renouvelables que ce qu'elle produit", a pour sa part précisé le professeur suisse Markus Fischer.
"Extinction massive". Avant cette VIe session, l'IPBES avait déjà averti que la Terre est confrontée à une "extinction massive" d'espèces, la première depuis la disparition des dinosaures il y a environ 65 millions d'années et la sixième en 500 millions d'années. "Avec les effets croissants du changement climatique (...) cette perte pourrait atteindre 40% d'ici 2050" dans les Amériques où elle s'élève déjà à 31%, a-t-elle souligné vendredi pour cette région. Au cours du siècle écoulé, deux espèces de vertébrés ont disparu chaque année en moyenne sur la Terre. Une autre est sur le point de disparaître avec la mort récente de Sudan, célèbre rhinocéros blanc du Kenya et dernier mâle de son espèce, décimée par le braconnage et dont il ne reste que deux femelles. "Si nous continuons ainsi, oui, la sixième extinction, la première causée par les humains, va se poursuivre !", a averti Robert Watson, ajoutant toutefois que "la bonne nouvelle, c'est (...) qu'il n'est pas trop tard".