Ils étaient dans la fosse du Bataclan. Le 13 novembre 2015, Thierry et Coralie ont tous les deux été touchés par les balles des terroristes, au pied et à l’omoplate pour elle, à la cuisse et l’omoplate pour lui. Leur quotidien est toujours rythmé par les rendez-vous médicaux : psy, kiné et même infirmiers tous les deux jours pour le grand trentenaire à la coupe afro. A l'occasion de l'hommage organisé dimanche à Paris, ils se racontent au micro d'Europe 1.
"J’y pense tous les jours". Diplômée en communication, la jeune femme cherche toujours un emploi, voire "sa voie". Lui a repris à mi-temps son poste de rédacteur de catalogues de pièces détachées de tracteurs. Avec un sentiment de culpabilité "de ne pas être productif à 100%". "J’y pense tous les jours", confie Thierry qui "a encore un peu de mal à accepter" ce qui s’est passé. "J’ai encore du mal à croire", abonde Coralie, qui voit devant elle "encore un très long chemin" avant de reprendre "une vie normale", sans angoisse dans les transports en commun, sans être "tout le temps en alerte".
Régulièrement, l’actualité comme les attentats de Bruxelles, Nice, Orlando, les replonge dans l’horreur. "J’ai l’impression que ça balaye tout le chemin que j’ai pu parcourir juste avant", précise le jeune homme "un peu frustré de ne pas pouvoir dire [qu’il va] complètement mieux".
Retourner à des concerts, "le jeu en vaut la chandelle". Ensemble, ils retournent à des concerts. Les Eagles of Death Metal à l’Olympia en mars, où ils ont pu rencontrer le groupe, en coulisses. Ou plus récemment, le groupe White Miles, qui assurait la première partie au Bataclan il y a un an. "Il y a toujours un peu d’appréhension avant, mais le jeu en vaut la chandelle", sourit Thierry. Ils sont aussi retournés au Bataclan avec les associations et des psychologues, pour tourner une page, "remettre les choses à leur place".
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Se sentir utile. Il y a un an, Benjamin était, lui, réfugié dans une petite pièce au premier étage du Bataclan, d’où il lançait un appel aux secours sur Facebook. Il était spécialement venu du Danemark, où il réside. Il ne reviendra pas pour les commémorations. "Surtout pas", lâche-t-il. Même si, comme les autres, il fait encore des cauchemars, le jeune homme préfère retenir "l’énergie ultra-puissante qui s’est dégagée de tout ça". "Une sorte de pression de réussir sa vie, d’être à la hauteur de la chance [qu’il] a eu", précise Benjamin, qui n’a plus peur de voir les portes se refermer. Designer, il travaille avec des sociétés européennes et américaines à la conception d’applications susceptibles d’aider les secours, pompiers, police, médecins, à mieux appréhender la situation et l’espace en cas d’attentat. L’envie "d’être fier", "de se sentir utile".
"Il va y avoir un bébé, de l’espoir, de l’amour". Le 13 novembre a aussi affecté sa vie intime, son projet d’avoir un enfant avec sa compagne notamment. "Ça remet tout en question, ce n’est pas évident de se dire qu’on va créer une famille dans un monde où tout peut s’arrêter, qui est impitoyable", explique Benjamin. Et d’ajouter : "mais avec le recul, ce qui en ressort c’est qu’il va y avoir un bébé, il va y avoir de l’espoir, il va y avoir de l’amour."