Mauvaise surprise pour Eric Woerth. Contrairement aux réquisitions du parquet de Bordeaux, qui avait demandé un non-lieu, l'ancien ministre du Budget sera finalement renvoyé devant le tribunal. Les trois juges d'instruction en charge du dossier, Jean-Michel Gentil, Cécile Ramonatxo et Valérie Noël, ont en effet décidé de poursuivre Eric Woerth, mais aussi Patrice de Maistre, pour trafic d'influence dans l'affaire Bettencourt.
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Un échange de bons procédés qui dérange. Les juges d'instruction estiment ainsi que le dossier comporte suffisamment d'éléments pour renvoyer les deux hommes devant le tribunal. En 2007, Eric Woerth, alors ministre du Budget, avait recommandé Patrice de Maistre, l'ex-gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, pour l'obtention de la Légion d'honneur. Quelque mois plus tard, Florence Woerth, la femme du ministre, avait été embauchée par Patrice Maistre au sein de la Clymène, une société spécialisée dans "l'optimisation fiscale" et qui gère la fortune de l'héritière de L'Oréal.
Dans les enregistrements datant d'avril 2010 et réalisés par le majordome de Liliane Bettencourt, Patrick de Maistre avait commenté de manière surprenante l'embauche de Florence Woerth : "J'avoue que quand je l'ai fait, son mari était ministre des finances, il m'a demandé de le faire. (...) J'l'ai fait pour lui faire plaisir...". Les juges soupçonnent en effet un échange puisque Patrice de Maistre était membre du club des donateurs fortunés de l'UMP, le "Premier cercle". Autant d'éléments qui rassemblent, aux yeux des magistrats, les conditions d'un trafic d'influence. De son côté, le parquet de Bordeaux, qui avait requis un non-lieu le 10 mai, avait estimé que "le lien de corrélation entre les deux faits n'est pas formellement démontré".
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Les deux hommes poursuivis sur d'autres pans du dossier ? Au total, l'affaire Bettencourt comprend trois volets. Le renvoi devant le tribunal de Patrice de Maistre et Eric Woerth concerne donc le volet pour "trafic d'influence". Mais les deux hommes sont également mis en examen dans le volet dit des "abus de faiblesse". Il s'agit du pan le plus spectaculaire du dossier Bettencourt. Il porte sur les possibles malversations commises par son entourage aux dépens de l'héritière de l'Oréal, considérée comme faible psychologiquement depuis septembre 2006.
Douze personnes sont mises en examen dans ce dossier et le parquet de Bordeaux a requis le 28 juin dernier des non-lieux pour six d'entre-eux, dont Eric Woerth et Nicolas Sarkozy. Le procureur avait toutefois requis le renvoi devant le tribunal correctionnel de Patrice de Maistre et de cinq autres membres de l'entourage de Liliane Bettencourt.