68% des professeurs ont déjà songé à une reconversion professionnelle lors de leur carrière, selon un sondage Ifop-SOS Education publié dans le Figaro. L'enquête révèle aussi que la moitié d'entre eux est ou a été en situation d'épuisement professionnel. Des chiffres qui viennent s'ajouter à une crise de recrutement. Seuls 3.000 postes sur les 20.000 promis par François Hollande avant 2017 ont trouvé preneur. Alors, prof, un métier en déshérence ? Contactés par Europe1.fr, un ancien prof de musique explique sa reconversion et une future prof qui prendra ses fonctions en septembre réagit.
La perte des illusions ? Maxime Kaprielan a 24 ans quand il a commencé à enseigner la musique. Après une ZEP dans les quartiers nord de Marseille, il est muté en banlieue parisienne. Et comme 40% des enseignants, il a eu le sentiment de ne pas recevoir de soutien de sa hiérarchie. "Dès que je rencontrais des difficultés, ma principale disait : "Ici, c'est la banlieue parisienne alors ne faites pas l'étonné." " Et l'ancien enseignant de parler "de refus de réflexe républicain" quand des élèves agresseurs ne sont pas sanctionnés. Certes, il savait qu'il allait perdre ses illusions "mais pas à ce point." Sophie Monnot est actuellement journaliste dans une petite radio de province. Elle est aussi heureuse titulaire du concours des écoles. Pour elle, pas de désillusion possible à la prochaine rentrée :"J'ai beaucoup de profs dans ma famille et je sais dans quoi je tombe. Je ne compterai pas sur ma hiérarchie même si évidemment, j'espère tomber sur une bonne direction."
"Je ne peux pas faire ça 30 ans". Maxime Kaprielan a obtenu le Graal lors de sa 2ème mutation : un prestigieux lycée parisien. Mais malgré des conditions d'enseignement idéales, il a alors songé à changer de métier. Pour quelles raisons ? L'usure physique et nerveuse, l'état d'esprit "Education Nationale" trop "immobile". Ce dernier reproche est balayé d'un revers de main par Sophie Monnot : "Franchement, c'est pareil dans le privé. Dans les rédactions, les journalistes qui sont un peu âgés peuvent aussi faire dans l'immobilisme". La routine "cours-corrections-conseils de classe" que Maxime Kaprielan pointe du doigt n'est pas non plus redoutée par Sophie Monnot : "Il faut savoir évoluer en demandant d'autres niveaux. Et puis, il y a des passerelles avec les autres fonctions publiques." Le ministère de l'Education Nationale propose désormais aux professeurs un "portail mobilité" qui les oriente vers leurs interlocuteurs académiques et leur fait connaître tous les dispositifs d'aide.
Un manque de reconnaissance. Des inspecteurs et une hiérarchie qui ne reconnaissent pas la valeur du travail des professeurs, voilà ce que dénonce le plus Maxime Kaprielan. Il raconte à Europe1.fr : "Dans le cadre d'un projet, j'ai fait jouer mes élèves au théâtre du Châtelet avec l'orchestre de Radio France ! Un grand moment ! Mais dans le public, mes chefs n'étaient pas là." Et une inspection au cours de sa quinzième année de métier a été la goutte de trop. L'inspecteur a jugé sont travail "nul". "Je travaillerai pour moi et les élèves, pas pour les chefs ou les inspecteurs", répond Sophie Monnot, "la reconnaissance des élèves, voilà ce qui comptera pour moi."Et en septembre, ce sera un nouveau départ dans la vie pour nos deux interlocuteurs. Sophie Monnot enseignera à une vingtaine d'enfants dans une école de Bourgogne. Pour sa part, Maxime Kaprielan sera attaché culturel d'un ensemble vocal marseillais. Et ce sera sans regrets, "je ne veux plus faire partie du monde de l'Education Nationale".
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