Christine Lagarde, déjà sous la menace d’une enquête de la Cour de justice de la République (CJR), est de nouveau visée par la justice dans le cadre de l'affaire Tapie. Le parquet de Paris a ouvert une nouvelle enquête préliminaire pour "abus de pouvoirs sociaux", a-t-on appris mercredi matin de source judiciaire.
Lancé mi-juin, cette enquête préliminaire vise directement deux subordonnés de la ministre de l’Economie, Jean-François Rocchi, président du Consortium de réalisation (CDR) et Bernard Scemana, président de l’établissement public supervisant le CDR, selon Le Monde daté du 23 juin.
Les deux hommes ont mis en œuvre en 2007, sur ordre de Christine Lagarde, le choix d’un arbitrage privé à la place de la voie judiciaire. Le but était de solder le contentieux concernant la revente d’Adidas au début des années 90, qui avait rapporté 403 millions d’euros à Bernard Tapie. Jean-François Rocchi aurait notamment permis à Bernard Tapie de toucher 45 millions supplémentaires en ajoutant dans le projet d’arbitrage la mention "préjudice moral", ajoute Le Monde.
"Lagarde est un peu plus dans le collimateur"
En s’intéressant à ces deux hauts fonctionnaires placés sous l’autorité directe de la ministre de l'Economie, le procureur de la République de Paris fait monter encore un peu plus la pression sur Christine Lagarde. D'autant que les deux fonctionnaires pourraient bien être contraints de l'impliquer pour mieux se défendre, à en croire le professeur de droit Thomas Clay.
"Incontestablement, dans cette affaire, madame Lagarde va devoir rendre des comptes. C'est elle qui a nommé et avait autorité sur les fonctionnaires qui sont aujourd’hui poursuivis", a décrypté sur Europe 1 ce spécialiste du droit de l'arbitrage. "S'ils veulent alléger les lourdes peines qu'ils encourent, ceux-là n'auront d'autres possibilités que de mettre en cause leur autorité de tutelle, de dire qu'ils ont agi sur injonction ou sur ordre (de Christine Lagarde, ndlr)", a-t-il poursuivi, avant de conclure : "donc, oui, madame Lagarde est aujourd'hui un peu plus dans le collimateur qu'elle ne l'était hier".
La ministre a déjà dénoncé ces "erreurs"
Cette nouvelle enquête s'ajoute donc à la procédure lancée par la Cour de justice de la République, qui a mis en délibéré au 8 juillet sa décision sur une éventuelle ouverture d’enquête. Et cette multiplication d'enquêtes pourrait coûter à Christine Lagarde la présidence du FMI, pour laquelle elle a beaucoup fait campagne.
Du côté de la ministre, on estime que ces informations ne révèlent rien de neuf et comportent des "erreurs" auxquelles la ministre a déjà répondu. "On constate qu'il s'agit d'un copier-coller d'un dossier réalisé par (le site d'information) Mediapart le 9 juin, avec les mêmes erreurs et les mêmes imprécisions", a affirmé l'entourage de la ministre.
Cette dernière "a répondu à toutes ces erreurs au président de la commission des requêtes" de la CJR, qui a également entamé une procédure dans cette affaire, ont ajouté ces sources proches de la ministre.