C'est un revers de plus pour Bernard Tapie. Jeudi, la Cour de cassation a confirmé l'annulation de l'arbitrage rendu en sa faveur, en 2008, dans son conflit avec le Crédit Lyonnais. Alors que ce litige opposant l'homme d'affaires à la banque dure depuis plus de 20 ans, cet arrêt de la haute juridiction sonne-t-il la fin de "l'affaire Tapie" ?
Un recours possible devant la CEDH. En réalité, l'affaire peut durer encore de nombreux mois. D'abord parce que l'ancien président de l'Olympique de Marseille peut choisir de contester devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) la décision de justice rendue jeudi par la Cour de cassation. Au vu du "concert frauduleux ayant existé entre l'un des arbitres, Pierre Estoup, et Bernard Tapie", la haute juridiction a confirmé l'annulation de l'arbitrage prononcée par la cour d'appel de Paris, en février 2015.
Mais l'homme d'affaires, n'est pas près de lâcher. "Le combat continue. Nous allons nous battre et nous irons aussi devant la Cour européenne des droits de l'Homme", a indiqué l'un de ses avocats, Me Frédéric Thiriez, à l'issue de la décision.
Tapie devra-t-il rembourser ? Au-delà de ce volet concernant l'arbitrage, un deuxième volet concerne le fond du dossier. Avec cette question : Bernard Tapie a-t-il été floué par le Crédit Lyonnais, lorsqu'il a décidé de revendre Adidas en 1994 ? C'est le combat d'une vie pour l'homme d'affaires. L'objectif de l'arbitrage privé, en 2008, était d'en finir au plus vite. Au titre du seul préjudice moral, Bernard Tapie s'était notamment vu allouer 45 millions d'euros. Mais en décembre dernier, la cour d'appel de Paris a considéré qu'il n'avait pas été lésé dans ce litige, et a donc exigé qu'il rende l'argent.
Théoriquement, Bernard Tapie doit donc rembourser à l'Etat les sommes allouées en vertu de cet arbitrage, soit 404 millions d'euros avec les intérêts. Toutefois, là encore, il s'est pourvu en cassation. Et l'audience n'est pas encore fixée. A ce jour, les époux Tapie n'ont donc encore rien remboursé. "Il n'y a pas de raison pour que la Cour de cassation se déjuge : la fraude est définitivement établie, et il serait très surprenant que la condamnation à rembourser ne soit pas confirmée", estime le professeur de droit Thomas Clay, spécialiste de l'arbitrage.
Un volet pénal encore en cours... Enfin, un troisième volet, pénal cette fois, est encore en cours dans ce dossier. Dans cette partie de l'affaire, on retrouve la question de la fraude au cœur de l'arbitrage. Un juge d'instruction a ainsi mis Bernard Tapie en examen pour "escroquerie en bande organisée", avec cinq autres protagonistes dont son avocat Maurice Lentourne et l'arbitre Pierre Estoup.
Cette enquête vient tout juste d'être bouclée par les magistrats chargés d’instruire le dossier, a-t-on appris jeudi 23 juin. On attend désormais de savoir si un procès aura lieu. "La justice marche à l'envers, a estimé Me Thiriez, la Cour de cassation nous parle de 'fraude' alors que l'instruction est toujours en cours. Que se passerait-il si elle aboutissait à un non-lieu?", s'est indigné jeudi l'avocat de Bernard Tapie.
Christine Lagarde renvoyée devant la justice ? Hasard du calendrier, l'affaire Tapie était encore ce vendredi au cœur de l'actualité. En décembre dernier, la directrice du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, a en effet été renvoyée pour "négligence" devant la Cour de justice de la République (CJR), chargée de jugée les membres de gouvernement dans l'exercice de leur fonction. Mais pour éviter ce renvoi, l'ex-ministre de l'Economie s'est pourvue en cassation.
Un recours que la haute juridiction examine justement ce vendredi. En milieu d'après-midi, l'avocat général a préconisé le rejet de ce pourvoi. Si son avis est suivi par la Cour de cassation, qui rendra sa décision le 22 juillet, Christine Lagarde comparaîtra donc devant la CJR. On est donc loin, très loin d'en avoir fini avec l'affaire Tapie.