L'arrestation du secrétaire départemental de la CGT du Nord et d'une employée du syndicat pour "apologie du terrorisme", en raison d'un tract controversé de soutien aux Palestiniens, a suscité vendredi l'indignation de personnalités politiques à gauche, qui dénoncent un "régime autoritaire". Leurs gardes à vue, qui ont duré toute la matinée, ont été levées aux alentours de 13H30. L'enquête "se poursuit", a indiqué le parquet de Lille à l'AFP, sans autre précision.
"Le tract a une forme d'apologie au terrorisme et d'appel à la haine"
Selon une source proche du dossier, les deux arrestations font suite à un tract appelant à une manifestation de soutien aux Palestiniens à Lille, diffusé par la CGT le 10 octobre, trois jours après l'attaque sanglante du Hamas contre Israël. Les policiers "considèrent que le tract a une forme d'apologie au terrorisme et d'appel à la haine", a expliqué l'avocat des gardés à vue, Me Ioannis Kappopoulos. Une phrase est particulièrement mise en cause : "les horreurs de l'occupation illégale se sont accumulées. Depuis samedi (7 octobre, ndlr) elles reçoivent les réponses qu'elles ont provoquées."
"On a rappelé ce matin que l'organisation CGT n'était pas liée au terrorisme, qu'elle n'était pas pour le terrorisme et qu'elle était là pour représenter les travailleurs partout dans le monde", a déclaré à sa sortie du commissariat le secrétaire départemental CGT, Jean-Paul Delescaut, dénonçant "un tribunal politique".
>> LIRE AUSSI - Attaque du Hamas en Israël : Karim Benzema affiche son soutien aux habitants de Gaza
"Une interpellation scandaleuse" selon Sophie Binet
Le préfet du Nord, Georges-François Leclerc, s'était notamment basé sur ce tract pour interdire des manifestations pro-palestiniennes. La préfecture n'a pas donné suite aux sollicitations de l'AFP. Une soixantaine de militants CGT se sont rassemblés vendredi avec une sono devant le commissariat de Lille, protégé par un cordon policier, a constaté un journaliste de l'AFP. Selon Hamid Chebout, coordinateur de la CGT du Nord, Jean-Paul Delescaut a été interpellé par "une dizaine de policiers", dont "sept cagoulés".
"On ne comprend pas. On est des responsables syndicaux connus, ils auraient pu convoquer Jean-Paul, il se serait présenté", a-t-il pointé. En déplacement à Bordeaux, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, a dénoncé "une interpellation scandaleuse". "Rien ne nécessitait une garde à vue et un tel emploi de la force (...) comme si c'étaient des terroristes", a-t-elle ajouté. "Nous sommes très inquiets du glissement et de la dérive en matière de liberté d'expression, et de libertés tout court."
"Un régime autoritaire de type nouveau"
"'Apologie du terrorisme' qui peut le croire ? L'apologie du terrorisme, c'est le soutien inconditionnel du gouvernement aux crimes de guerre à Gaza", a réagi sur X (anciennement Twitter) le chef de file de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, regrettant un "régime autoritaire de type nouveau". "Si je ne partage pas le tract qui lui est reproché, je n'accepte pas qu'on traite un syndicaliste comme un terroriste ! Solidarité", a de son côté réagi le patron du parti communiste Fabien Roussel.
>> LIRE AUSSI - Israël-Hamas : comment le conflit au Proche-Orient fragilise dans les rangs de La France insoumise
Quant au premier secrétaire du parti socialiste, Olivier Faure, il a interpellé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin : "c'est pour exercer nos libertés que nous nous battons face au terrorisme, pas pour les supprimer !". Sophie Binet a rappelé vendredi que son syndicat avait "dès le lendemain des attaques terroristes du Hamas, exprimé toute sa solidarité avec les civils", "dénoncé les violences contre les civils" et appelé "à un cessez-le-feu immédiat". Membre du Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, la CGT a appelé à un grand rassemblement "halte au massacre" dimanche à 15 heures place de la République à Paris.