Attentat de Nice : Sadisme, pornographie et violences : les proches du tueur de Nice témoignent

Mohamed Lahouaiej Bouhlel est décrit comme quelqu'un de "mythomane", "égoïste" et "violent" par ses proches.
Mohamed Lahouaiej Bouhlel est décrit comme quelqu'un de "mythomane", "égoïste" et "violent" par ses proches. © AFP
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O.G
Mohamed Lahouaiej Bouhlel est décrit comme un homme narcissique, obsédé par la violence et le sexe, mais dont la radicalisation reste un mystère.

4 minutes et 17 secondes d'horreur. C'est le temps qui aura servi à Mohamed Lahouaiej Bouhlel pour tuer 86 personnes au volant d'un camion de 19 tonnes au soir du 14 juillet à Nice. Trois mois jour pour jour après l'attentat, un hommage national sera rendu le 14 octobre prochain à Nice, en présence du chef de l'État. C'est trois mois plus tard, aussi, que les premiers éléments de l'enquête - auxquels ont eu accès Le Parisienet Libération - permettent de cerner la personnalité du tueur de Nice. Son ex-femme, ses employeurs et ses rares amis, tous peinent à comprendre l'escalade de violence dans laquelle s'est enfermée ce père de trois enfants, né il y a 31 ans à M'saken, en Tunisie.

Sites pornos, salles de sport et stéroïdes. "Il avait le démon en lui", témoigne son beau-frère. "Il m'avait même montré la poupée gonflable qu'il avait chez lui", poursuit-il. Aux enquêteurs, les proches de Mohamed Lahouaiej Bouhlel dépeignent un dragueur invétéré à la sexualité omniprésente. "Avec lui, tout tournait autour du sexe", rapporte une jeune femme inscrite dans la même salle de sport. Un ami intime du Franco-tunisien évoque même des scènes de violences conjugales où l'homme pouvait brutaliser son épouse "pour avoir des rapports sexuels directs, brutaux, sans sentiments".

Personnalité ambivalente, Mohamed Lahouaiej Bouhlel laisse le souvenir d'un homme trouble, "mythomane" selon certains, obsédé aussi par son apparence physique. De 2012 à 2014, cet amateur de sports de combat se dope aux stéroïdes et fréquente une salle de sport où "il pouvait se montrer agressif et également très doux", se souvient la gérante. "Je le voyais comme quelqu'un de perturbé, de fragile et d'instable mais pas du tout dangereux, encore moins avec un profil de terroriste", ajoute t-elle.

"Je suis Charlie". Une zone d'ombre dans la personnalité de cet homme que ses proches surnomment "Salmene", son deuxième prénom. Lui qui mange du porc, fume de temps en temps et boit de l'alcool semble loin de l'État islamique ou des départs en Syrie de jeunes français dont la presse parle régulièrement : "On s'en fiche, ils vont mourir là-bas de toute façon", aurait-il répondu à son ami. "Il se considérait comme Français et détestait les Arabes", poursuit ce proche du tueur. Le soir des attentats de Charlie Hebdo, Mohamed Lahouaiej Bouhlel lui aurait même envoyé un sms avec ces trois mots : "Je suis Charlie".

Selfies et photos de décapitations. Malgré ses nombreuses conquêtes féminines et masculines, Mohamed Lahouaiej Bouhlel est un homme solitaire qui se prend souvent en selfie. Comme le dernier, pris dans l'après-midi du 14 juillet, où son visage apparaît sur la Promenade des Anglais, au milieu des passants. Devant les enquêteurs, rares sont les personnes à pouvoir expliquer la transformation de Lahouaiej Bouhlel. En 2014, il est embauché comme chauffeur livreur dans une entreprise de transports où tout semble bien se passer, malgré une condamnation en mars 2016 à six mois de prison avec sursis pour avoir frappé un automobiliste avec une palette de bois.

Plus de trois mois après la tuerie du 14-Juillet, les enquêteurs n'ont pas trouvé de traces d'allégeance à l'Etat islamique. Les recherches dans son téléphone portable ou son ordinateur révèlent un condensé de recherches mélangeant sites pornographiques et une fascination pour la violence extrême, comme des vidéos de décapitations. Plus éloquent : l'enquête montre que Mohamed Lahouaiej Bouhlel avait minutieusement préparé son passage à l'acte à grands renforts de repérages sur la Promenade des Anglais et se documente seul ou avec un ami (cinq personnes, suspectées d'avoir joué un rôle de soutien sont mises en examen et écrouées, ndlr).

"Pour la gloire", "Par sadisme." Quelques jours après l'attentat, François Molins, procureur de Paris, faisait allusion, au cours de sa conférence de presse, à une "radicalisation éclair". Les proches du terroriste évoquent davantage quelqu'un de "complètement taré" - pour une proche de son ex-femme - ou ayant des "problèmes psychiatrique" - selon un ami d'enfance. "Si des gens l'ont influencé, ça a pu être déterminant", explique son ami intime. "Je pense qu'il a aussi pu faire cela pour la gloire", ajoute t-il. Une amie de son ex-femme lâche : "Pour moi, c'est un sadique. Il l'a fait par sadisme".

Un Français derrière la revendication de l'État islamique

Deux jours après l'attentat, l'Etat islamique publie une revendication sous forme de fichier sonore via Telegram. D'abord en arabe, puis en français. Une revendication alors que le terroriste n'a pas fait allégeance, c'est une première. La traduction en français du communiqué a permis aux enquêteurs d'identifier Adrien Guihal, un Français de 31 ans ayant adopté la kunya (nom de guerre, ndlr) Abu Oussama.

Parisien d'origine, il est connu pour son implication au sein des services de communication de l'Etat islamique. En 2012, il est condamné à trois ans de prison pour avoir voulu attaquer en 2008 les locaux des renseignements généraux. Placé sous contrôle judiciaire en juin 2012, il en profiter pour rejoindre l'organisation terroriste en Syrie.