C'était il y a un an et demi. Le 26 juillet 2016, deux terroristes pénètrent dans la petite église de Saint-Étienne-du-Rouvray. L'un d'entre eux s'approche du prêtre, Jacques Hamel, et l'égorge devant ses fidèles, en pleine messe. L'émotion est immense et aujourd'hui, une question se pose : cet attentat aurait-il pu être déjoué ? Le site Médiapart révèle vendredi matin que l'un des terroristes était suivi de près par les services de renseignements.
De nombreux messages postés sur Telegram. Cinq jours avant l'assassinat du père Hamel, un policier, sous alias, derrière son ordinateur, tombe sur une chaîne Télégram, une messagerie cryptée, aux messages plus qu'intrigants. L'administrateur, sous pseudonyme, y a posté plus de cent photos, trois vidéos et une centaine de messages vocaux. L'homme, qui préconise l'application de la loi du Talion en France, se dévoile et raconte ses tentatives de départ en Syrie, l'obligation qu'il a de porter un bracelet électronique et les cours qu'il donne trois fois par semaine dans une mosquée de Saint- Étienne-du-Rouvray. Dans un message audio de sept minutes, il encourage enfin à cibler des églises au couteau.
Une erreur dans la transmission des informations. Après la découverte de ces éléments, le policier, un brigadier en poste à la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris, selon Mediapart, avise sa hiérarchie et rédige une note blanche destinée théoriquement à la DGSI. Lui ne sait pas qui se cache derrière ce compte Telegram, mais avec autant d'éléments il est permis de se demander si Adel K. n'aurait pas pu être identifié. Sauf que sa note n'arrivera jamais à Levallois. En plein cœur de l'été, mi-juillet, la hiérarchie de ce policier qui doit valider l'écrit est soit en vacances, soit débordée et passe à côté. Le 25 juillet, de nouveaux messages évoquent quelque chose d'exceptionnel à venir. Le lendemain, le père Hamel est tué dans son église.
Tentative de camouflage. En découvrant leur bévue, les supérieurs du policier lui auraient demandé de post-dater sa note et de faire croire, en somme, qu'il a découvert tous ces messages après coup. Mediapart qui a enquêté pendant six mois n'hésite pas à mettre en cause le fonctionnement très à part de ce service de renseignement de la préfecture de police qui a son propre fichier qu'il ne partage pas avec la DGSI. Jeudi soir, plusieurs policiers, joints par Europe 1, sont tombés des nues. Le parquet de Paris n'était pas au courant et aucune enquête n'est en cours sur cette tentative de camouflage. L'ancien patron du renseignement parisien, lui, n'a pas donné suite aux sollicitations d'Europe 1.