Depuis début octobre, 13 vols ont déjà été effectués. Des voyages à bord d'un avion bimoteur à hélices, un Beechcraft 1900, que notre reporter a vu décoller depuis l'aérodrome de Calais-Marcq, lundi après-midi. C'est la surprenante solution qu'a trouvée l'Etat pour tenter de désengorger le centre de rétention administrative de Calais, surchargé face à l'afflux de migrants, comme le racontait Streetpress dans une enquête publiée lundi. A l'intérieur de ce jet privé, des familles vont être transférées vers d'autres centres sur le territoire français.
Peu de migrants par vol. Lors de chaque trajet, il y a cinq migrants, encadrés chacun par deux fonctionnaires de la police aux frontières (PAF). Sur le tarmac, un fourgon de policiers ne quitte les lieux que lorsque l'avion est dans les airs.
Une opération à 1,5 million par an. La location de cet appareil à une société privée coûte 1,5 million d'euros par an. Mais cet avion ne sert pas qu'à éloigner les migrants de la "jungle" de Calais, il est aussi utilisé surtout pour des transports d'enquêteurs de la Direction générale de la Police nationale ou de la surveillance aérienne.
15.000 euros par migrant. Toutefois, depuis quelques mois en effet, c'est avec ce Beechcraft 1900 que l'Etat transfère certains migrants en instance d'expulsion pour désengorger le centre de rétention de Calais. Des transferts vers Toulouse, Nîmes ou Perpignan, qui coûtent cher : environ 15.000 euros par migrant, selon un avocat spécialiste du droit des étrangers.
Eloignés à des centaines de kilomètres, ils reviennent à Calais. Des centaines de milliers d'euros "jetés par les fenêtres", selon un responsable d'association, qui auraient pu être utilisés pour améliorer l'accueil des migrants à Calais. Les défenseurs des réfugiés pointent l'absurdité de ce dispositif. Car, neuf fois sur dix, les migrants se retrouvent dans la nature et ne sont finalement pas expulsés. Certains sont même revenus à Calais, après avoir été transportés à l'autre bout de la France.
De Calais à Hendaye… A l'instar d'Hamid, un migrant afghan qui a tenté en août dernier de traverser le tunnel sous la Manche, avant d'être arrêté à Calais. Il est alors contraint, sans aucune explication, de monter à bord du jet privé affrété par le ministère de l'Intérieur. Direction Hendaye, à plus de 1.000 km de Calais.
… Puis de Hendaye à Calais. Là-bas, il arrive dans un centre de rétention pour être ensuite présenté à un juge, mais il est relâché pour vice de procédure. Hamid décide alors de repartir à Calais par ses propres moyens, seulement deux semaines plus tard, il est de nouveau intercepté par les policiers. Son avocate, Laurence Hardouin, raconte la suite à Europe 1 : "Il a une nouvelle fois été transféré à Hendaye et, là encore, il a été libéré. Je me demande à quoi ça sert de les transférer et de les présenter à un juge. Ce n'est pas en disséminant les gens dans des centres de rétention qu'ils y arriveront." Et d'ajouter : "C'est la Cimade qui prend en charge, de manière quasi-permanente, le retour de ces personnes vers l'endroit où elles étaient avant d'être interpellées."