Le parquet d'Évry a requis un procès pour homicides et blessures involontaires à l'encontre de la SNCF et d'un cheminot, six ans après la catastrophe de Brétigny-sur-Orge, en Essonne, qui avait fait sept morts et des dizaines de blessés, a-t-il annoncé vendredi. Le cheminot, 24 ans à l'époque, était à la tête d'une brigade chargée de l'inspection des voies au moment du déraillement, en juillet 2013. C'est lui qui avait réalisé la dernière vérification, huit jours avant la catastrophe. Il revient désormais aux juges d'instruction de décider de les renvoyer ou non devant le tribunal correctionnel. Sollicité, l'avocat de la SNCF, Emmanuel Marsigny, a indiqué "ne pas être en mesure de communiquer" sur un document dont il n'avait "pas eu connaissance".
Le 12 juillet 2013, le train Intercités Paris-Limoges avait déraillé en gare de Brétigny-sur-Orge en Essonne quand une éclisse - sorte de grosse agrafe qui maintient deux rails consécutifs - avait pivoté, provoquant l'accident. Le bilan de l'une des pires catastrophes ferroviaires survenues en France depuis une vingtaine d'années fut lourd : trois morts parmi les passagers du train, quatre parmi les personnes qui attendaient sur le quai, et des dizaines de blessés. L'enquête a exclu "toute faute du conducteur ou un quelconque acte de malveillance", a expliqué le parquet dans un communiqué.
Un morceau de voie mal entretenu à l'origine du drame
Le parquet a conclu que le train avait déraillé en raison "de défauts de maintenance", d'un "système de surveillance insuffisant", et de "manquements dans l'organisation des ressources humaines". Pendant les cinq années de l'enquête, toutes les expertises ordonnées par la justice ont conclu que le train avait déraillé à cause d'un morceau de voie mal entretenu qui s'est désagrégé au fil du temps. La SNCF estime de son côté que l'assemblage incriminé a cédé brutalement en raison d'un défaut de l'acier, et donc que l'accident était imprévisible - une hypothèse qui la dédouanerait.
Les juges d'instruction avaient annoncé la fin de leurs investigations début 2019, après cinq ans d'enquête et un rebondissement inattendu : quelques jours avant la clôture, un cadre de la SNCF avait été mis en examen, également pour homicides et blessures involontaires. Jusqu'alors et malgré les demandes répétées des familles de victimes qui voulaient "mettre des visages" sur cette catastrophe et voir des "hommes de terrain" ou leur hiérarchie devant la justice, seules deux personnes morales avaient été mises en examen pour homicides involontaires : la SNCF et RFF (Réseau ferré de France, le gestionnaire des voies, devenu SNCF Réseau, pour qui le parquet a également demandé un renvoi devant le tribunal).