Le témoin interrogé depuis mercredi dans l'enquête sur le quadruple meurtre de 2012 à Chevaline, en Haute-Savoie, a été libéré, sa garde à vue levée sans "aucune charge" retenue contre lui, a indiqué jeudi le parquet d'Annecy. La garde à vue, initiée mercredi matin, puis prolongée, "a été levée ce jour à 17h30 sur décision des juges d'instruction du tribunal judiciaire d'Annecy. Aucune charge n'a été retenue contre la personne gardée à vue", selon un communiqué du parquet.
"Des vérifications d'emploi du temps"
La procureure d'Annecy Line Bonnet avait initialement indiqué que le but était de "procéder à des vérifications d'emploi du temps" ainsi qu'à "des perquisitions" chez cet homme qui avait déjà été entendu et dont l'identité n'a pas été révélée. "Les explications données et les vérifications opérées ont permis d'écarter son éventuelle participation aux faits", indique le parquet jeudi, ajoutant que "les investigations continuent pour identifier le ou les auteurs du crime dans le cadre de l'instruction judiciaire en cours".
L'avocat du suspect Jean-Christophe Basson-Larbi avait fustigé mercredi soir une garde à vue "pas justifiée" en affirmant que son client avait déjà été mis hors de cause en 2015 et a "toujours eu à coeur de participer à la manifestation de la vérité". Cet homme "est en train de vivre les heures les plus sombres de sa vie", s'était-il insurgé. "C'est un homme qui arrive à tenir le coup, qui reste solide, mais qui est dans une terreur absolue, celle d'une erreur judiciaire. Il a le sentiment de nager en plein Kafka".
Selon plusieurs journaux, dont Le Dauphiné Libéré, ce témoin serait un motard présent sur le site le jour de la tuerie et longtemps considéré comme le principal suspect dans cette affaire hors norme - précision que la procureure n'a pas souhaité confirmer. Elle avait toutefois confirmé que l'homme figurait parmi quatre témoins "remis en situation" et chronométrés sur la base de leurs déclarations sur les lieux du drame il y a un peu plus de trois mois.
Des milliers d'heures d'enquête
L'affaire de la "tuerie de Chevaline" a déjà donné lieu à des milliers d'heures d'enquête et d'auditions, des tonnes de documents épluchés et quatre interpellations, sans avoir pu être élucidée à ce jour. Elle compte parmi les grandes énigmes judiciaires qui ont tenu la France en haleine ces cinquante dernières années. Le 5 septembre 2012, un Britannique d'origine irakienne de 50 ans, Saad al-Hilli, son épouse de 47 ans et sa belle-mère de 74 ans avaient été retrouvés morts, avec plusieurs balles dans la tête, dans leur voiture sur une route de montagne près de Chevaline, sur les hauteurs du lac d'Annecy.
L'une des fillettes du couple al-Hilli avait été grièvement blessée tandis que la seconde, recroquevillée sous les jambes de sa mère, était miraculeusement sortie indemne de cette tuerie. Un cycliste de la région, Sylvain Mollier, 45 ans, probable victime collatérale, avait été abattu pendant la fusillade. Un motard croisé le jour des faits par des agents de l'Office national des forêts, ne s'était jamais présenté aux autorités, soulevant de fortes suspicions quant à sa possible implication dans la tuerie. Son portrait robot avait été diffusé.
Les gendarmes étaient finalement remontés jusqu'à lui en identifiant les 4.000 numéros de portable qui avaient déclenché l'un des relais de téléphonie mobile situés près du lieu du crime. Des images de vidéosurveillance avaient permis de recouper ces investigations. Interrogé par les juges d'instruction en février 2015, l'homme, un entrepreneur de la région, avait expliqué s'être rendu sur les bords du lac d'Annecy pour pratiquer le parapente. Les différentes pistes suivies par les enquêteurs n'ont pas permis à ce jour d'élucider la tuerie.