Ils s'appellent Linky pour l'électricité, ou Gazpar pour le gaz. Le premier est déjà installé dans plus de 870.000 foyers français, le second est en cours de test dans un département d'Ile-de-France. Ces compteurs "intelligents", loin de faire l'unanimité, viendront remplacer l'ensemble des équipements de l'Hexagone dans les prochaines années.
- Les compteurs "intelligents", c'est quoi ?
Les anciens compteurs ne faisaient qu'enregistrer la consommation d'énergie, nécessitant l'intervention d'un technicien pour la relever. Les compteurs "intelligents" - ou "communicants" -, sont, eux, capables de recevoir des "ordres" et de transmettre des données sans intervention physique. En pratique, ils permettent de relever, à distance et en direct, la consommation d'électricité, de gaz ou d'eau d'un abonné.
- Comment fonctionnent-ils ?
La "télé-relève" des compteurs Linky est effectuée en principe une fois par jour, en moins d'une minute. Les compteurs Gazpar et les compteurs d'eau transmettent les informations de consommation deux à six fois par jour, en moins d'une seconde. Le but : permettre une facturation plus précise que celle basée sur des estimations.
- Qui concernent-ils ?
Pour ce qui est de l'électricité, un décret du 31 août 2010 fixe un objectif de déploiement du compteur Linky dans 95% des foyers au 31 décembre 2020. Le remplacement des 35 millions d'anciens boîtiers a commencé fin 2015 et doit intervenir progressivement. En six mois, 871.000 compteurs ont été installés, selon un bilan dressé par EDF début juin. "Nous en posons environ 8.000 par jour. Il y a 438 communes dans lesquelles nous avons installé des compteurs", expliquait alors le directeur du programme Linky chez Enedis (ex-ERDF). Le rythme d'installation s'est progressivement accéléré pour monter à 40.000 par jour : à la fin de l'année, la filiale d'EDF devrait avoir implanté 3 millions de ces compteurs.
Le compteur Gazpar n'en est, lui qu'au début de son déploiement. Un millier de boîtiers ont été installés à Rueil-Malmaison, dans les Hauts-de-Seine, pour procéder à des tests jusqu'à la fin du mois de décembre. De 2017 à 2022, ce type de compteur doit être étendu aux 11 millions de foyers français abonnés aux gaz. Concernant l'eau, 1,7 million de compteurs intelligents avaient déjà été déployés par Suez début décembre, selon la Gazette des communes.
- Sont-ils dangereux pour la santé ?
Non, à en croire l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'environnement et du travail (Anses), qui a rendu public un avis sur la question, jeudi. "Les conclusions de l'agence, dans la configuration de déploiement actuelle (...), vont dans le sens d'une très faible probabilité que l'exposition aux champs électromagnétiques émis (...) puisse engendrer des effets sanitaires à court ou long terme", écrit l'Anses. Selon elle, qu'il s'agisse de champ électrique ou magnétique, les compteurs Linky "sont à l'origine d'une exposition comparable à celle d'autres équipements électriques" comme une télévision, un chargeur d'ordinateur portable, une table de cuisson à induction. Quant à l'exposition à proximité d'un compteur intelligent de gaz ou d'eau, elle est "bien plus faible que celle due à un téléphone mobile GSM", selon l'agence.
Reste que les études sur le sujet n'en sont qu'à leur début : dans son avis, l'Anses relève qu'il n'existe "pratiquement aucune littérature scientifique traitant des effets sanitaires spécifiques de l'exposition aux compteurs communicants". Des associations de personnes souffrant d'hypersensibilité aux ondes ont par ailleurs exprimé leurs inquiétudes face à la généralisation de ces équipements. Début décembre, une Iséroise éléctrosensible a obtenu le retrait de son compteur d'eau "intelligent" devant la justice. La décision fera-t-elle jurisprudence ?
- Pourquoi sont-ils critiqués ?
Au-delà des risques sanitaires potentiels, les détracteurs de ces compteurs redoutent un surcoût, une intrusion dans leur vie privée et l'utilisation de leurs données personnelles. Plusieurs maires ont "décidé de prendre des délibérations ou des arrêtés visant à refuser la pose des compteurs sur leur territoire", reconnaissait en mars François Baroin, président de l'Association des maires de France (AMF). Assignées en justice par Enedis, une dizaine de communes ont vu ces délibérations suspendues, dans l'attente d'un jugement sur le fond.
Selon l'Anses, une partie du problème réside dans la méconnaissance de ces équipements par la population. Dans son rapport, l'agence engage "les opérateurs impliqués dans le déploiement de ces nouvelles technologies à fournir une meilleure information du public quant à leurs modalités de fonctionnement actuel et futur." Réagissant à ces conclusions, l'eurodéputée écologiste Michèle Rivasi a, de son côté, demandé qu'une "étude contradictoire et menée avec des laboratoires indépendants soit menée pour affiner les premiers résultats obtenus par l'Anses".