La Convention citoyenne pour le climat (CCC), lancée par Emmanuel Macron après la crise des Gilets jaunes, a voté dimanche en faveur d'un référendum visant à créer un crime d'écocide dans le droit français. Mais qu'est-ce qu'un écocide ? L'idée des 150 citoyens tirés au sort participant à la Convention est d'adopter une loi créant ce crime qui vise à sanctionner une atteinte grave à l'environnement. Ils souhaitent que cette question, ainsi que l'inscription dans la Constitution de la lutte contre le dérèglement climatique, soit soumise à référendum.
Selon leur proposition, "constitue un crime d'écocide, toute action ayant causé un dommage écologique grave en participant au dépassement manifeste et non négligeable des limites planétaires, commise en connaissance des conséquences qui allaient en résulter et qui ne pouvaient être ignorées. Afin que la sanction possible soit dissuasive, la peine encourue doit être, dans le cas d'une violation par une entreprise, outre une peine d'emprisonnement et une amende pour les dirigeants d'entreprise ou les personnes directement responsables, une amende en pourcentage significatif du chiffre d'affaires de cette entreprise et doit inclure l'obligation de réparation".
Les "limites planétaires" auxquelles fait référence la CCC sont celles à ne pas dépasser pour préserver la planète, en matière de réchauffement climatique ou de préservation de la biodiversité par exemple.
Apparition dans les années 70
La notion d'écocide est apparue au début des années 1970 après l'utilisation au Vietnam par l'armée américaine de l'agent orange, un défoliant chimique qui a détruit une partie importante de la forêt vietnamienne, et dont les conséquences sur la population (cancers, malformations) se font encore sentir aujourd'hui. Mais si les attaques contre l'environnement ont fait leur entrée dans les textes internationaux relatifs aux conflits armés (Conventions de Genève, Statut de Rome de la Cour pénale internationale), les atteintes graves à l'environnement en temps de paix n'ont jamais été reconnues comme crime par le droit international.
Des propositions de loi pour l'introduction de l'écocide dans le droit pénal français ont d'ailleurs été rejetées cette dernière année au Sénat et à l'Assemblée nationale, dont l'une prévoyait une peine de réclusion criminelle de vingt ans et de 7,5 millions d'euros d'amende.
Corinne Lepage, qui a rappelé sur Europe 1 avoir défendu cette notion d'écocide au Parlement, estime toutefois que "ce n'est pas la panacée universelle". Selon elle, l'écocide a certes "beaucoup d'intérêt sur le plan international" mais moins au niveau national. "Lorsque Bolsonaro décide de déforester massivement l'Amazonie, lorsque des agrochimistes mettent sur le marché des produits cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques, il y a cette notion d'écocide et d'écohumanicide aussi. Cela a donc vraiment un sens".
Au niveau national, dit-elle, "pourquoi pas, mais ce n'est pas la panacée universelle. Ce dont nous souffrons aujourd'hui en matière d'environnement, c'est la régression des règles que nous avons déjà. Si on arrêtait de détricoter ce qui existe (enquêtes publiques, concertation, études d'impact, législation sur les installations classées...), ce serait déjà bien." L'introduction de l'écocide dans le droit peut donc être une bonne chose, assure Corinne Lepage, "mais il ne faut pas que ce soit l'arbre qui cache la forêt, et malheureusement la forêt de la difficulté est immense."