Modifier les critères d'éligibilité pour accéder à l'aide à mourir, "c'est rompre l'équilibre de ce projet de loi", a mis en garde la ministre de la Santé Catherine Vautrin, en introduisant les débats à l'Assemblée nationale sur le texte du gouvernement.
La ministre réclame un retour à la version initiale du projet de loi, plus stricte
Le gouvernement souhaite que l'aide à mourir soit "ouverte uniquement" aux personnes majeures "atteintes d'affections graves et incurables avec pronostic vital engagé à court ou moyen terme, souffrant de douleurs insupportables et réfractaires aux traitements" et "qui en expriment la demande de manière libre et éclairée", a-t-elle souligné. La ministre réclame un retour à la version initiale du projet de loi, plus stricte, tandis que les députés ont supprimé en commission la notion de "pronostic vital engagé à court ou moyen terme", lui préférant celle d'affection "en phase avancée ou terminale".
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Catherine Vautrin a aussi longuement insisté sur le "discernement" du patient jusqu'au bout, "fondement" de ce projet de loi : la "volonté libre et éclairée du patient" sera le "pilier absolu du texte", a-t-elle assuré. "Seul le patient doit exprimer sa volonté de manière libre et éclairée et réitérée", a souligné la ministre, alors que des députés de gauche et du camp présidentiel demandent d'ouvrir l'aide à mourir à des patients qui l'auraient demandée dans des directives anticipées, avant de perdre leur discernement.
Dans le "périmètre précis" fixé par le gouvernement, environ "4.000 personnes par an" seraient concernées par l'aide à mourir, a estimé Catherine Vautrin, "majoritairement atteintes de cancers ou de fibrose pulmonaire en phase terminale, de maladies neurodégénératives graves en phase très avancée qui peuvent entraîner une paralysie des muscles impliquant la motricité ou la déglutition". Catherine Vautrin a affiché "son attachement à un texte d'équilibre", "boussole" de ce débat, tout en voulant répondre à une "demande sociétale claire, d'aller un pas plus loin" dans la législation en vigueur sur la fin de vie.
"L'heure est grave et à de nombreux titres"
Mais au-delà des mots, c'est le principe même d'une aide à mourir qui en irrite certains. C'est le cas du député Les Républicains Patrick Hetzel : "L'heure est grave et à de nombreux titres. Vous nous proposez une rupture anthropologique majeure puisque vous voulez institutionnaliser, par la loi, le fait de rendre possible le suicide et l'euthanasie". Des discussions empreintes de gravité et qui ne font que commencer.
L'Assemblée nationale a prévu deux semaines de discussions en première lecture, le vote devant avoir lieu le 11 juin, avant la transmission du texte au Sénat à la rentrée prochaine. Les parlementaires vont avoir beaucoup plus de temps pour tenter de trouver un point d'équilibre puisqu'il y aura jusqu'à six lectures au Sénat et à l'Assemblée. Ce qui signifie que le vote final du texte ne devrait pas intervenir avant le printemps 2026.