Il était allé en cours dans la matinée, ne laissant rien transparaître. Killian, un élève de 16 ans du lycée Tocqueville de Grasse, dans les Alpes-Maritimes, est revenu de la pause déjeuner vers 13h lourdement armé dans son établissement, muni d'un fusil de chasse, de deux armes de poing et de grenades, provoquant une fusillade.
Le proviseur s'interpose. L'élève, inscrit en 1ère L, tire d'abord sur le proviseur du lycée, qui tentait alors de s'interposer. "Le proviseur s'est précipité" vers l'agresseur lorsqu'il a sorti son arme "pour tenter de le raisonner", a indiqué à la presse la ministre de l'Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, qualifiant cette action d'"héroïque". Trois lycéens ont également été blessés légèrement par des plombs. Au total, Killian a tiré à deux ou trois reprises dans cet établissement qui compte près de 900 élèves.
Les élèves se calfeutrent. À ce moment-là, dans les salles de classe et aux abords de l'établissement, la panique gagne les lycéens. "On a vu plein de gens descendre en criant : 'Y'a un taré qui tire sur les gens !' On est parties en courant", a raconté à l'AFP Mokhtaria, une élève de seconde qui fumait alors avec des amies dans le garage à motos du lycée. Certains élèves se sont réfugiés dans le Leclerc voisin. Pour les élèves à l'intérieur de l'établissement, il leur a été demandé de rester dans le lycée et de se calfeutrer dans les salles de classe.
Crédit photo : VALERY HACHE / AFP
"Des traces de sang dans les couloirs". "Au début je pensais que c'était des pétards, mais après ça commençait à grossir et à être de plus en plus forts, et après j'ai compris que c'était des coups de feu", a témoigné sur Europe 1 Yohan, qui était en cours au moment de la fusillade. "On a alors mis les tables devant les portes pour pas qu'il rentre, on s'est mis tous derrière. On voyait certains s'enfuir en escaladant les portails, il y en a même un qui est monté sur le toit, j'ai alors commencé à paniquer", poursuit-il.
Yohan et ses camarades de classe sont restés confinés pas moins de deux heures dans leur classe, jusqu'à l'évacuation orchestrée par les forces de l'ordre. "Il y a avait des traces de sang dans les escaliers, dans les couloirs, c'est traumatisant", confie-t-il encore. Vers 17h, les lycéens quittaient l'établissement, portant tous un bracelet d'identification posé auparavant par les pompiers pour différencier les témoins directs ou non, la plupart éprouvés, accompagnés de leurs parents, très bouleversés. Dix autres lycéens ont été pris en charge, choqués par la fusillade ou blessés après des bousculades.
Le tireur se laisse interpeller. Killian a été interpellé cinq minutes seulement après le début de la fusillade, vers 13h05, les forces de l'ordre ayant été dépêchées rapidement sur place. "Il s'est laissé interpeller de manière extrêmement docile, il n'a montré aucune résistance", a relevé la procureure de la République de Grasse, Fabienne Atzori. Un engin explosif artisanal a été retrouvé dans son sac à dos et a été désamorcé sur place.
[#Grasse] Fin d'intervention du #RAID et des démineurs au lycée #Tocqueville
— Police Nationale (@PoliceNationale) 16 mars 2017
Périmètre de sécurité maintenu pour l'enquête.
"L'acte fou d'un jeune fragile". Présenté comme un élève discret et réservé, Killian montre un tout autre visage sur les réseaux sociaux, où il poste des photos de clowns morbides et des images de la tuerie de Columbine aux Etats-Unis, manifestement fasciné par les armes à feu. Il y a une semaine, après une dispute, "il a envoyé des Gifs de gens qui se faisaient fusiller", a indiqué une élève du lycée à Europe 1. La fusillade est "visiblement l'acte fou d'un jeune homme fragile et fasciné par les armes à feu", a déclaré Najat Vallaud-Belkacem.
De mauvaises relations avec ses camarades ? La procureure de la République a indiqué que les motivations du tireur, qui a agi seul, "semblent liées aux mauvaises relations qu'il entretiendrait avec d'autres élèves" de l'établissement. "Il semblerait qu'il ait quelques difficultés (...) à s'intégrer" dans l'établissement, a-t-elle ajouté. On ne sait toutefois pas si les élèves blessés étaient ses cibles initiales. Placé en garde à vue en début d'après-midi pour "tentatives d'assassinats", le lycéen est désormais longuement entendu par les enquêteurs. La piste terroriste est, à ce stade, écartée.