"Gilets jaunes" : Triste dimanche en France... et maintenant on fait quoi ?

gilets jaunes, paris, arc de triomphe 1280 Geoffroy VAN DER HASSELT / AFP
Dimanche matin, les employés du service entretien de la Mairie de Paris tentaient d'effacer les stigmates des violences qui ont eu lieu sous l'Arc de Triomphe, la veille. © Geoffroy VAN DER HASSELT / AFP
  • Copié
Anaïs Huet
Des dizaines de blessés, des centaines d'interpellés, et des rues saccagées. La mobilisation des "gilets jaunes" samedi à Paris a viré à l'émeute dans plusieurs quartiers du cœur de Paris. Une réunion d'urgence doit se tenir à l'Elysée dimanche.

Des scènes de chaos en plein Paris. Au lendemain de la mobilisation des "gilets jaunes", qui a tourné à l'émeute, le réveil est difficile pour les Parisiens, et pour tous les Français qui ont eu à voir les images diffusées en boucle sur les chaînes d'information. Les dégâts matériels sont considérables. Mais surtout, le bilan humain est effrayant.

Les principales informations à retenir

  • Le bilan des violences a été revu à la hausse : 412 interpellations, 133 blessés dont 23 membres des forces de l'ordre
  • Une réunion d'urgence doit se tenir à l'Elysée en présence d'Emmanuel Macron
  • La question de l'instauration de l'état d'urgence est posée par les syndicats de police

Le bilan humain

L'intensité des violences de samedi peut se résumer en quelques chiffres :

→ 133 personnes ont été blessées, dont l'une d'elle se trouve en état d'urgence absolue. Ce manifestant a été gravement blessé par une grille du Jardin des Tuileries qu'il venait de desceller avec d'autres "gilets jaunes".

→ Parmi les blessés figurent 23 membres des forces de l'ordre

→ 412 personnes ont été interpellées

→ 372 d'entre elles ont été conduites en garde à vue

Des pompiers ont par ailleurs été caillassés alors qu'ils tentaient d'éteindre des incendies sur la voie publique.

Ce bilan, "très important" selon une source policière, est nettement supérieur à celui de la précédente mobilisation parisienne le 24 novembre. Selon la préfecture de police, les violences avaient fait 24 blessés, dont 5 côté forces de l'ordre, 103 personnes avaient été interpellées, dont 101 placées en garde à vue.

giletsjaunes

Le bilan matériel

Barricades, voitures incendiées, commerces pillés, affrontements entre forces de l'ordre et manifestants, les violences, d'abord concentrées en matinée au niveau de l'arc de Triomphe, se sont ensuite multipliées dans la capitale. Près de 190 départs de feu ont été traités par les sapeurs-pompiers pendant la journée et six immeubles ont été incendiés, selon le ministère de l'Intérieur. 

"C'est comme si une tornade était passée avenue de la Grande Armée", se désole un commerçant. Toutes les vitrines sont en mille morceaux. Dans son magasin de cigarettes électroniques complètement dévalisé, Joël déblaye et fait les comptes. "Vous vous rendez compte de la force avec laquelle ils ont cassé ? Ils ont tout volé. On a au minimum 30.000 à 40.000 euros de dégâts", témoigne-t-il au micro d'Europe 1. "Hier, on a fermé à 17h15. Les CRS étaient à l'angle de la rue, les casseurs étaient côté Rivoli, et nous on était juste entre les deux. C'était complètement apocalyptique", raconte un restaurateur, dont l'établissement est situé près du Jardin des Tuileries.

Dimanche matin, l'heure est au nettoyage pour les personnels de la ville.

En régions, si les mobilisations ont été plus "calmes", on déplore tout de même l'incendie de la préfecture de Haute-Loire après le jet de cocktails Molotov

Dimanche matin, la zone de péage autoroutier de Narbonne sud, des voitures de la société Vinci et des bâtiments ont été incendiés "par des casseurs".

L'état d'urgence envisagé

"Il n'est pas question que chaque week-end, ça devienne un rituel de la violence", a mis en garde Benjamin Griveaux, dans la Matinale d'Europe 1 dimanche. C'est aussi l'avis de plusieurs syndicats de police, parmi lesquels Alliance, qui appellent le gouvernement à décréter l'état d'urgence. Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner ne l'a pas exclu, tout comme le porte-parole du gouvernement qui a indiqué sur Europe 1 : "Toutes les options doivent être étudiées (…) Il faut réfléchir aux mesures que l’on peut prendre pour éviter que ce type de très graves manifestations de violence sur la voie publique ne puissent se reproduire à Paris".

Pour Laurent Berger, invité du Grand Rendez-vous Europe1/Cnews/Les Echos dimanche, "l'état d'urgence n'est pas une solution". "Je ne vois pas comment l'état d'urgence réglerait le problème. Je n'y crois pas du tout", a encore appuyé le syndicaliste. Et d'avertir : "Il faut faire attention avec les mots. On a parlé d'insurrection. Il y avait des scènes insupportables de violence. Mais ce n'était pas une insurrection", a soutenu le leader de la CFDT.

Alliance police nationale demande par ailleurs "le renfort de l'armée pour garder les lieux institutionnels et dégager ainsi les forces mobiles d'intervention." Une réunion d'urgence est prévue à l'Elysée.

inceidie

Castaner et Nuñez entendus mardi au Sénat

La commission des lois du Sénat entendra mardi les ministre et secrétaire d'État à l'Intérieur Christophe Castaner et Laurent Nuñez "sur les émeutes, les agressions contre les forces de sécurité et les actes de vandalisme et de destruction" lors des manifestations des "gilets jaunes", selon un communiqué dimanche de la Haute-Assemblée.

La commission entendra les "explications" du ministre de l'Intérieur et son secrétaire d'État "sur les moyens mis en place (...) pour y faire face". Cette audition portera également sur "les dispositions nouvelles qui doivent impérativement être prises pour prévenir la répétition et l'aggravation de ces troubles d'une extrême gravité, sans porter atteinte au droit constitutionnel des Français d'exprimer leurs opinions et leur mécontentement par des manifestations non violentes".

Des "gilets jaunes" appellent au calme, mais...

Dans une tribune publiée par le Journal du dimanche, les porte-parole de "gilets jaunes libres" appellent à une "sortie de crise" et affichent leur souhait d'être "les porte-parole d'une colère constructive". Les signataires de l'appel disent espérer "un accord rapide" et appellent leurs soutiens à se structurer localement "loin de toute radicalisation et en accord avec les 80% de Français qui nous soutiennent" pour "(construire) un projet viable et crédible, dans l'intérêt de tous".

Certains groupes Facebook des "gilets jaunes" ont d'ores et déjà appelé à un acte 4 à la mobilisation, samedi prochain.