Héritage : vers une baisse des droits de succession ?

PASCAL GUYOT / AFP
Les droits de succession pourraient être revus à la baisse. Photo d'illustration. © PASCAL GUYOT / AFP
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Thibaud Le Meneec
Selon un sondage, plus des trois quarts des Français veulent supprimer les droits de succession pour une résidence principale jusqu'à 500.00 euros. Une mesure envisagée par le gouvernement, qui servirait principalement les contribuables favorisés.
ON DÉCRYPTE

"Les débats, je le crois, nous indiquent clairement la direction à prendre, nous devons baisser et baisser plus vite les impôts." Lundi, au moment de présenter les conclusions du "grand débat national", Édouard Philippe a confirmé les orientations que veut prendre le gouvernement en matière de fiscalité. Un message déjà martelé dans une interview au JDD, dimanche, par le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin, qui confirmait la volonté de l'exécutif de réduire les niches fiscales, "supprimer la redevance audiovisuelle" ou "baisser les impôts de production pour les entreprises".

Mais aussi "baisser les droits de succession", une mesure qui plaît aux Français, selon un sondage Ifop paru dans le journal : 77% des personnes interrogées veulent la suppression des droits de succession sur la résidence principale jusqu'à 500.000 euros. Cette mesure, ou un dispositif similaire, pourrait donc figurer parmi les décisions d'Emmanuel Macron, qui doit procéder aux premières annonces mi-avril. Faut-il pour autant y voir un moyen de rétablir la justice fiscale réclamée par de nombreux Français pendant ces quelques semaines de consultation ? 

Quelle est la situation actuelle ?

Les droits de succession, qui concernent des biens mobiliers ou immobiliers, sont en réalité des "droits de mutation à titre gratuit" : à la mort d'un parent, le bien n'est pas vendu, mais transmis gratuitement à un héritier, qui est taxé sur cette transmission. En général, expliquait récemment au Parisien une avocate spécialisée au barreau de Paris, le taux le plus courant est de 20% de la succession. Mais il faut également préciser qu'il existe un abattement de 100.000 euros par enfant à qui il est fait une succession. Si trois enfants héritent d'une maison de 450.000 euros, par exemple, ils ne paieraient que des impôts sur 50.000 euros chacun avec un taux de 20%.

"Finalement, 90 % des successions sont exonérées d’impôts", concède ainsi Me Jean-Philippe Feldman, maître de conférences à Sciences Po, au Parisien. "Mais les gens ne supportent pas l’idée qu’ils ont travaillé toute leur vie, ont payé des impôts sur leur patrimoine et qu’au moment de le transmettre, leurs enfants devront encore payer. Il y a un aspect affectif, très sentimental."

Qui serait concerné par cet allègement de la fiscalité ?

Les personnes taxées sur des héritages compris entre 100.000 euros et un demi-million d'euros sortiraient de l'assiette fiscale si le gouvernement allait au bout de sa démarche. Ce sont pourtant elles qui représentent le coeur des personnes aujourd'hui imposées : selon la dernière étude disponible de l'Insee, les Français reçoivent en moyenne 135.400 euros en donations et/ou héritage ; l'héritage médian est quant à lui de 41.100 euros (une moitié reçoit plus, une moitié reçoit moins de cette somme). Un bien immobilier valait lui en moyenne 220.387 euros, en 2013.

Quel serait le manque à gagner ?

Reste que les "droits de mutation à titre gratuit" rapporte beaucoup d'argent à l'État : selon les estimations de la loi de finances 2019, les "mutations à titre gratuit par décès" génèrent environ 11,76 milliards d'euros de recettes. Les "mutations à titre gratuit entre vifs", ou donations, font rentrer 2,35 milliards d'euros dans les caisses publiques. Soit des recettes de 14 milliards d'euros qu'il faudrait revoir à la baisse en cas de taxation plus faible des successions à l'avenir.