Hugo, 23 ans, a toujours été attiré par la lumière des projecteurs : il voulait devenir chanteur. Mais à la sortie du secondaire, au moment de s'orienter vers une formation dédiée aux métiers du chant et de la scène, son père a posé son veto. Ce dernier attendait de son fils qu'il s'oriente vers une carrière juridique, moins hasardeuse selon lui. Au micro d'Olivier Delacroix, sur Europe 1, Hugo raconte comment il a réussi, non sans mal, à trouver un terrain d'entente avec lui.
"Je pense que c'était lié au fait que, dans les ancêtres de ma famille, il y a eu pas mal de notaires et d'avocats. C'était aussi un peu le côté prestigieux, sérieux et concret de ces métiers : on fait des études, on passe du CDD ou CDI, c'était un peu plus sûr. Je viens de province, je pense que c'est aussi l'une des raisons. Mes ancêtres étaient considérés comme des gens nobles de par leur métier.
Mais moi, [ce qui m'intéressait] c'était plus les paillettes, l'artistique, la musique, le chant et le spectacle. Tout petit déjà, j'étais dans l'organisation de spectacles : je dansais et je chantais avec mes amis. On faisait des courts-métrages. On était vraiment dans l'artistique. Au lycée, j'ai pris une spécialité musique dans l'optique de suivre cette voie-là. Mais au moment où j'en ai parlé avec mon père, ça ne s'est pas très bien passé…
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Pour le père d'Hugo, le métier de chanteur correspondait à un fantasme, difficilement accessible pour un garçon de province…
Je me suis heurté, littéralement, à un mur. Il m'a dit de redescendre sur terre, que c'était un rêve d'enfant, qu'il fallait l'abandonner et faire quelque chose de concret. Il en revenait aux notaires et aux avocats. Il me disait : 'Hugo, tu as 18 ans, il faut grandir et arrêter de rêver, de vouloir être le prochain Justin Bieber ou quelque chose comme ça.' Je lui ai expliqué que les métiers de la musique et de l'artistique, ça n'est pas nécessairement être une popstar, et qu'il y a aussi des métiers de l'ombre : auteur, compositeur… Malgré toutes ces explications, pour lui, il en était hors de question.
Je pense qu'il projetait un peu ses peurs sur moi. Il aime bien que les choses soient carrées. Il est cartésien, il faut que ce soit classique. Pour lui [ce que je voulais faire] était inaccessible, réservé aux gens qui avaient déjà baigné dans le milieu et dont un parent était dans les médias ou la musique. Il fallait en tout cas, pour passer à la télé ou travailler dans les médias, avoir quelqu'un qui a déjà un pied dedans.
Finalement, Hugo s'est orienté vers le journalisme, une profession plus convenable aux yeux de son père, et qui permet aussi au jeune homme de satisfaire son attrait pour le monde des médias.
C'est un compromis pour mon père. Pour moi, enfant, c'était ma deuxième passion, donc ma deuxième carte. En CM1, à l'école, je rédigeais déjà des articles. Je m'exprimais aussi à travers ça ; en plus des courts-métrages, je réalisais également des reportages avec mes amis. J'y passais beaucoup de temps. Je me suis dit : pourquoi ne pas lui proposer ça aussi ?
Ce que je dirais aux parents, c'est de ne pas projeter leurs envies, leurs rêves ou leurs regrets sur leurs enfants, tout simplement parce que l'enfant sera différent d'eux et aspirera sûrement à d'autres choses. Il s'agit de la vie de l'enfant, et non pas de celle du parent par procuration. Je pense qu'il est important de laisser une certaine liberté à l'enfant, et surtout d'en parler."
L'avis de notre spécialiste
Les dissonances qui peuvent exister entre les aspirations d'un enfant et celles de ses parents trouvent souvent leurs origines dans un décalage générationnel, comme l'explique Anne Bacus, psychologue spécialiste des thérapies familiales et auteure du livre Traitez-les comme des mômes. "Le monde change tellement vite que, parfois, les parents projettent sur leurs enfants quelque chose de leur propre monde, de leur propre histoire, alors que les métiers de demain, on ne les connait même pas", relève-elle, également au micro d'Olivier Delacroix sur Europe 1.
"Tout change tellement vite que l'on doit écouter nos enfants, et surtout leurs passions, leurs enthousiasmes", poursuit cette spécialiste. Pour elle, il est important de ne pas générer des frustrations en étouffant les espoirs et les ambitions des plus jeunes. "Il y a tellement d'enfants qui ne savent pas ce qu'ils veulent faire que, quand on a la chance d'avoir un enfant qui a une passion et un désir fort, évidemment qu'il faut l'accompagner là-dedans, autant que l'on peut."