Réputé turbulent dans les salles d'audience, Jawad Bendaoud s'est montré plus calme qu'à l'accoutumée aux deux premiers jours de son procès pour "recel de malfaiteurs terroristes", mercredi et jeudi. Un effort salué par Me Holleaux, avocat des parties civiles, en préambule à ses questions, vendredi. "On m'avait parlé d'un imbécile dont tout le monde se moquait, et j'ai vu plutôt quelqu'un d'intelligent, qui était capable d'argumenter. Pour moi, vous n'êtes pas violent, vous êtes d'abord énergique. Vous semblez avoir du cran."
"Ça peut arriver aux autres". D'abord flatté, Jawad Bendaoud, vêtu d'une veste de sport jaune fluo, abonde : "quand vous voyez à la télé des affaires comme Kouachi, comme Merah, vous vous dites que ça peut arriver aux autres mais pas à vous..." Il évoque le jour de l'assaut du Raid dans son appartement de Saint-Denis, lorsqu'il a soudain pris conscience qu'il hébergeait des terroristes. "Demandez à ma copine : je me suis réveillé, j'ai pas fumé une cigarette, alors que je suis un gros fumeur... "
Me Holleaux en vient au fils de Jawad Bendaoud et à la fille de sa compagne, qu'il considère comme la sienne. L'avocat leur fait décrire leurs relations. "On s'entend très bien, y'a pas un jour où ils n'ont pas leurs Granolas, leurs gâteaux préférés", répond le prévenu. En creux, l'avocat essaie de savoir si les habitudes du logeur ont changé samedi 14 novembre 2015, au lendemain des attentats. Mais Jawad Bendaoud ne comprend pas. "Je les emmène au Mcdo. Mon fils, il est un peu peureux, c'est le contraire de moi."
"Je vais venir vous voir dehors !" Me Holleaux insiste : quel est le programme exact des week-ends en famille ? Subitement, le prévenu perd ses nerfs, prenant tout le monde de court : "Vous êtes un voleur de mobylettes ! Je ne sais pas ce que vous essayez de faire". Et de menacer l'avocat en le pointant du doigt : "parce que moi je vais venir vous voir dehors à votre cabinet !" Indignation chez les autres avocats des parties civiles. "Calmez-le", exhorte Me Mouhou. "Il menace tout le monde, ça n'est pas possible !"
L'annonce de la présidente, Isabelle Prévost-Desprez, de suspendre brièvement l'audience, n'apaise pas les tensions. Jusqu'à son évacuation, Jawad Bendaoud continue de crier, hissant son visage par-dessus la vitre du box : "je vais pas frapper un vieux monsieur ! je ne suis pas un lâche moi !". Quelques minutes plus tard, le prévenu revient dans la salle, visiblement calmé par son avocat, Me Noguéras. Pour combien de temps ?