Karine, 35 ans, est une "navetteuse" depuis neuf ans : trois fois par semaine, cette habitante de Rouen se rend à Paris pour son travail d'assistante sociale. Au départ compliquée, cette organisation est devenue progressivement plus simple pour elle, entre un domicile provincial, de nouvelles amitiés nouées dans les transports et une situation professionnelle adéquate. Elle raconte cet équilibre au micro Europe 1 d'Olivier Delacroix, mardi.
"Il y a dix ans, mon mari cherchait du travail. Il en a trouvé sur Rouen et je me suis mise à faire des allers-retours avec Paris, où nous habitions. Ça nous faisait un peu peur de quitter l'Île-de-France parce qu'on avait tout notre réseau d'amis là-bas. Ça a été un choix de vie assez réfléchi, on s'est vraiment demandé si on le faisait. On s'est aussi dit qu'on allait gagner en qualité de vie en partant à Rouen.
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On se rend tout de suite compte que la qualité de vie s'améliore avec des mètres carrés en plus en arrivant. On a la possibilité d'avoir plus grand, pour moins cher : les loyers tournent autour de 500, 600 euros, parfois moins chers, pour gagner 20 à 30 mètres carrés. Ça va parfois du simple au double. Très rapidement, on peut être au bord de la mer, on peut être en forêt.
Et il y a malgré tout la proximité avec l'Île-de-France : en 45 minutes, on peut être dans les Yvelines. On a encore beaucoup d'amis et de la famille de ce côté-là. On n'a pas perdu d'amis parce qu'on est sur Rouen. On se voit différemment, c'est tout. Pour nous, c'était un bon compromis de pouvoir, le week-end, continuer à aller en Île-de-France, à aller au bord de la mer en 45 minutes, à Honfleur ou Fécamp.
Journée bien rythmée
Quand je me lève, il est 5h30. Forcément, mes deux petites filles et mon mari dorment encore, à la maison. Moi, je prends le train à 6h30. J'ai la chance de ne pas habiter très loin de la gare, à 10 minutes à pied, donc c'est plus facile pour me déplacer. Je n'ai pas de voiture à prendre, pas de vélo, pas de transport en commun. C'est plutôt appréciable.
Au début, 5h30 du matin, c'était difficile. Je n'avais pas forcément l'habitude de me lever aussi tôt quand j'habitais à Paris. Mais finalement, c'est un rythme qu'on prend assez rapidement et finalement, la journée est bien rythmée donc on s'y fait. C'est mon mari qui gère les enfants, pour le matin ou le soir.
Dans le train, on voit souvent les mêmes personnes donc il y a des liens qui se créent : on organise des apéros ou des galettes des rois. On essaye d'optimiser le temps de trajet. Etant donné que c'est plus difficile de se créer un réseau à Rouen en travaillant à Paris, le train m'a permis de rencontrer des gens que je vois parfois même en dehors.
"Bon compromis"
La plupart du temps, les gens sont conscients que ce sont des temps de trajet longs, qu'on part assez tôt le matin et qu'on peut rentrer parfois tard le soir, mais il y a en même temps une telle qualité de vie pour la famille que la plupart continue à le faire et ne se verrait pas revenir vivre en Île-de-France.
J'ai la chance de travailler à 60%. Trois jours par semaine, c'est le bon compromis. Ça permet d'être avec mes filles le mercredi à la maison et de les emmener d'aller à l'école le vendredi. J'aime ce que je fais à Paris. Je ne me verrais pas chercher un travail à Rouen parce qu'on a trouvé une bonne organisation familiale. Ça me convient tout à fait et je ne ressens pas le besoin de me rapprocher de mon domicile.
Finalement, on se recrée un petit monde. J'aime toujours dire qu'on a trois vies : la vie dans le train, la vie au travail et la vie à la maison. Les trois vies se mêlent, parce que mes collègues savent que je fais les allers-retours. À la maison, je parle de mon travail et des retards sur les trains. On s'y retrouve."
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