Des résidents maltraités, de la nourriture rationnée et des soins d'hygiènes mal réalisés pour améliorer la rentabilité du groupe de maisons de retraite… Il y a un an, la France découvrait avec consternation les dysfonctionnements du groupe Orpea, après la publication du livre Les Fossoyeurs du journaliste Victor Castanet. Depuis, plus de 80 plaintes ont été déposées, le directeur général a été limogé et le gouvernement s'est emparé de l'affaire. Pourtant, selon Maitre Sarah Saldmann, avocate au Barreau de Paris qui représentent les familles des victimes des Ehpad des groupes Orpea et Korian et invitée d'Europe 1 ce samedi matin, "les choses n'ont pas changé chez Orpea".
"On oublie les personnes qui n'ont pas d'interlocuteurs"
"J'ai des demandes actuelles pour des personnes qui résident en ce moment chez Orpea", a-t-elle ajouté. "À l'inverse, je n'ai pas de nouvelles demandes pour Korian, ou alors seulement pour des faits anciens. Orpea, c'est pour des faits actuels. J'ai aussi des salariés qui me confirment la même chose en me demandant de préserver leur anonymat. Je ne vois pas de changement. Une personne que je représente vient de témoigner pour ses deux parents qui sont dans le groupe et il n'y a aucun changement."
>> LIRE AUSSI - «C'est toujours du bricolage» : un an après, peu de changements dans les Ehpad du groupe Orpea
Pourtant, après le scandale, le groupe avait assuré que des contrôles internes avaient été réalisés. Mais pour l'avocate, le nombre de situations de maltraitances est probablement sous-estimé. "On oublie les personnes qui n'ont pas de famille, et pour lesquelles on ne saura jamais ce qui leur arrive. Ce sont peut-être des personnes malmenées car elles n'ont pas d'interlocuteurs, ou qu'elles sont atteintes de la maladie d'Alzheimer, ou très vulnérables… On n'en parle pas", regrette-t-elle au micro d'Europe 1.
Sans mettre la responsabilité sur le personnel de ces Ehpad, Sarah Saldmann considère que "c'est la vulnérabilité qui me pose question. J'entends que ce soit un métier difficile, mais quand on le fait, on ne peut pas se comporter ainsi avec des personnes vulnérables. Il n'y a pas d'humanité. Et on peut aussi se demander si les personnes victimes n'ont pas les ressources pour se défendre ou si elles minimisent ce qui leur arrive par peur de représailles ?".
"Jusqu'où faut il aller pour qu'il y ait une prise de conscience ?"
Une situation courante selon la représentante des familles de victimes, qui rappelle que ces faits sont dénoncés depuis des années. "Orpea ne me donne pas d'interlocuteur, pas de confrère adverse, ne me répond pas et ne répond pas aux familles. Jusqu'où faut il aller pour qu'il y ait une prise de conscience ?", interroge-t-elle.
"Ils nous répondent 'on manque de moyens'. C'est inaudible de dire ça aux familles. Vous payez 5.000 € par mois, le groupe a des subventions de l'État mais dit 'on manque de moyens'. Comment vous voulez que les familles comprennent ? Moi même, je ne comprends pas", conclut-elle.
En juin 2022, Orpea a été condamné pour "manquements" après le décès d'une résidente, en 2017. Une plainte qui avait été déposée bien avant le début du scandale.