Pour mettre fin à la violence et à l'immigration clandestine à Mayotte, l'opération Wuambushu a démarré ce lundi 24 avril. Quelque 1.800 gendarmes et policiers sont déployés à Mayotte, le 101e département français, avec comme consignes de déloger et d'expulser les personnes en situation irrégulière. Mais cette opération se déroule dans un climat très tendu : de nouveaux affrontements ont eu lieu ce lundi entre CRS et délinquants dans le sud du chef-lieu, Mamoudzou.
Les principales informations :
- L'opération Wuambushu a débuté ce lundi matin
- Les Comores ont refusé l'accostage de bateaux
- Le collectif "Uni-e-s contre une immigration jetable" demande l'abandon de l'opération
Premières destructions de bidonvilles ce mardi
Les affrontements ont lieu depuis vendredi soir dans le secteur de Tsountsou. Dimanche, 12 policiers ont été légèrement blessés. Ils ont été la cible de caillassages par des bandes de jeunes descendus des bidonvilles. Ces derniers se trouvent lundi soir fixés par les forces de l'ordre dans les hauteurs du village. C'est ici que le préfet Thierry Suquet a tenu un point presse dans l'après-midi, pour déclarer notamment que la France "n'arrêtera pas" l'opération Wuambushu.
>> A LIRE AUSSI - Mayotte : dans «le plus grand bidonville d’Europe», les craintes de l’opération Wuambushu
Symbole de l'atmosphère électrique qui règne à Mayotte, une femme a d'ailleurs interrompu la prise de parole du préfet. Elle était très en colère parce que sa maison a été justement incendiée par les émeutiers. "On a détruit ma maison ! Je n'ai rien fait à personne, je travaille tranquillement, je gagne ma vie", a-t-elle clamé. "Cette dame a raison d'être en colère", a enchaîné le préfet, "parce que sa maison a été brûlée par des voyous et des délinquants". Dans ce secteur, les habitants, souvent ciblés, sont favorables à l'opération anti-immigration. Beaucoup de Mahorais craignent des représailles, notamment lors des destructions de bidonvilles qui doivent démarré ce mardi.
"On n'arrêtera pas" les opérations contre la délinquance et les bidonvilles, affirme le préfet
Le préfet de Mayotte a affirmé lundi que la France "n'arrêtera pas" les opérations contre la délinquance et les bidonvilles menées sur ce territoire français de l'océan Indien, alors que des défenseurs des droits humains se sont inquiétés des actions entreprises contre les migrants en situation irrégulière.
"Les opérations (...) de lutte contre la délinquance et de lutte contre l'habitat insalubre, avec leurs conséquences sur l'immigration clandestine, on ne les arrêtera pas", a déclaré le préfet Thierry Suquet devant la presse à Tzoundzou, dans la banlieue de Mamoudzou. Le représentant de l'Etat a également dit espérer "reprendre rapidement" les rotations de bateaux vers l'île comorienne d'Anjouan, alors que les Comores ont refusé lundi l'accostage d'un navire transportant notamment des migrants en provenance de Mayotte.
Les Comores refusent l'accostage de bateaux
Les Comores ont déclaré lundi avoir refusé l'accostage d'un bateau transportant des migrants en provenance de Mayotte, où les autorités françaises ont annoncé une opération anti-migrants controversée, et suspendu le trafic de passagers dans le port où les personnes expulsées sont habituellement débarquées. "Tant que la partie française décidera de faire des choses de façon unilatérale, nous prendrons nos responsabilités. Aucun expulsé ne rentrera dans un port sous souveraineté comorienne", a déclaré à l'AFP le ministre comorien de l'Intérieur, Fakridine Mahamoud.
Un collectif demande l'abandon de l'opération
Le collectif "Uni-e-s contre une immigration jetable" (UCIJ-2023), qui réunit 400 associations et syndicats, a lancé lundi une mobilisation nationale contre la politique migratoire du gouvernement et "exiger l'abandon de l'opération Wuambushu" à Mayotte qui lui fait craindre "des violences et atteintes au droit". "Cette 'action spectaculaire' de destructions de bidonvilles et d'expulsions massives promise par Gérald Darmanin annonce de multiples violences et atteintes au droit", estime l'UCIJ-2023, qui rassemble 400 associations et syndicats, dont la Ligue des droits de l'Homme (LDH).
"La mobilisation se poursuit pour continuer à dénoncer ces projets du gouvernement qui stigmatisent et criminalisent les migrants", a déclaré Cybèle David (Union syndicale solidaires), lors d'une conférence de presse. La vice-présidente de la LDH Marie-Christine Vergiat a pour sa part dénoncé une "politique répressive" du gouvernement vis-à-vis des migrants, "qui oublie totalement la question sociale". "Mayotte est une zone de non-droit, quasiment toutes les législations à Mayotte sont des législations d'exception. C'est particulièrement vrai en matière de droit des étrangers, c'est vrai aussi pour les expulsions locatives", a-t-elle indiqué.
Après l'opération de contrôle, repérage de terrain à Dembeni
Sur un rond-point au sud de Mamoudzou lundi matin, 12 gendarmes ont surveillé les trajets des voitures pour trouver des personnes recherchées et "éventuellement de continuer à lutter contre l'immigration clandestine afin de calmer les évènements qui se passent à Mayotte actuellement", a témoigné le lieutenant d'un escadron de gendarmes mobiles qui est arrivé sur l'île il y a une semaine.
Après cette opération de surveillance, les gendarmes se sont rendus dans un petit village de Dembeni où ils sont allés au contact des habitants et des commerçants. C'est justement dans ces endroits que la situation peut dégénérer. Dimanche 23 avril, les CRS ont été pris à partie par des jeunes descendus des bidonvilles. Ces derniers ont caillassé les policiers et au moins six d'entre eux ont été légèrement blessés.