Les "mentalités n'ont absolument pas changé" au sein de l'Église, a déploré mercredi l'une des avocates des plaignants, face au cardinal Philippe Barbarin et cinq anciens membres de son diocèse, jugés à Lyon pour ne pas avoir dénoncé les agressions sexuelles d'un prêtre. Chez Wendy Bouchard, mercredi sur Europe 1, le Père Pierre Vignon, curé du Vercors et auteur du livre Plus jamais ça !, a fortement mis en doute la capacité de l'Eglise à opérer un changement, dès lors qu'elle n'assumait pas sa responsabilité.
"Un procès qui traite aussi de la morale". "La stratégie du cardinal Barbarin consiste à dire : 'j'ai commis des erreurs indéniablement, mais pas de faute pénale.' Or, on est dans un procès qui traite aussi de la morale. Le centre du procès, ce n'est pas le cardinal Barbarin, c'est l'approche des victimes, et c'est ça qui a été loupé. En campant sur la prescription, ils font leur travail d'avocats, mais ça devient odieux", a fustigé le Père Vignon, qui fut juge à l'officialité interdiocésaine de Lyon pendant 16 ans, avant d'être démis de ses fonctions pour ses vives critiques à l'égard de l'Eglise.
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S'attaquer à la racine du mal. "La honte que nous ressentons est devenue notre problème numéro 1. Il faut qu'on sorte de cette honte, mais pas en se défaussant", plaide le Père Vignon, qui a lancé l'été dernier une pétition réclamant la démission du cardinal Barbarin, signée par plus de 108.000 personnes. Pour autant, sur notre antenne, il assure ne pas demander foncièrement la tête du cardinal. "J'ai dit : 'Monsieur le cardinal, c'est une question de crédibilité générale de l'Eglise. Est-ce que vous voulez qu'on aille tous dans le mur avec vous ?'", rétablit-il, avant d'assurer ne pas vouloir se battre contre l'épiscopat, mais bel et bien s'attaquer "à la racine du mal".
"Il faut qu'on ait de vrais chefs, qui assument". Dès lors, comment procéder ? Pour le Père Pierre Vignon, le pape François ne peut pas tout faire tout seul. Les évêques et cardinaux doivent prendre la responsabilité de dénoncer immédiatement les actes de pédophilie dont ils ont connaissance. "Une des idées du pape François, c'est la synodalité, c'est-à-dire qu'il ne veut pas régler à Rome des questions qui devraient être réglées au niveau régional ou national. Le problème, c'est que le système de nomination de nos chefs depuis plus de 150 ans fait que ce sont des gens extrêmement soumis, extrêmement dociles. Ils disent : 'mais moi, j'ai fait ce que Rome m'a dit', c'est d'ailleurs la réaction du cardinal Barbarin", explique le curé du Vercors. "C'est ça qu'il faut changer, il faut casser la machine. Il faut qu'on ait des gens plus énergiques, qui disent 'pas de ça chez nous'. On attend de vrais chefs, qui assument."