Avec l'ouverture à toutes les femmes de la procréation médicalement assistée (PMA), la France risque d'être confrontée à "une pénurie de dons de sperme", a estimé le professeur Fabrice Guérif, à l'occasion de la 22e Journée de la Fédération Française d'Etude de la Reproduction qui se déroule à Tours.
La secrétaire d'État à l'égalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa a annoncé mardi que l'accès à la PMA, actuellement réservé au traitement de l'infertilité chez les couples hétérosexuels, sera étendue aux femmes célibataires et aux couples lesbiens "probablement" en 2018 "avec les révisions de la loi bioéthique".
12 à 15 mois d'attente pour un couple hétérosexuel. Pour le professeur Guérif qui co-préside la journée et praticien au CHU Bretonneau de Tours dans le service Biologie et médecine du développement et de la reproduction, gynécologie médicale, "il s'agit d'un progrès si les femmes célibataires et lesbiennes ont droit à la procréation médicalement assistée, mais nous risquons la pénurie de dons de gamètes (gratuits et anonymes en France)". Dans le cadre restreint actuel, "3.000 couples seraient en attente. Rien qu'à Tours, un couple hétérosexuel doit attendre de 12 à 15 mois en moyenne pour bénéficier d'un don de sperme", a souligné le praticien. Cela peut remettre en cause le principe de la gratuité du traitement, selon des experts présents à Tours, qui relèvent que le coût, en Espagne, d'une insémination artificielle est estimé entre 800 et 1.500 euros.
"Des femmes lesbiennes viennent en grand nombre de France". Selon le professeur Belge André Van Steirteghem qui codirigeait le Centre de médecine de la reproduction de l'Université libre de Bruxelles, où a été inventée la technique de fécondation assistée, la microinjection de spermatozoïdes (communément appelée ICSI, en anglais Intracytoplasmic Sperm Injection), l'ouverture de la PMA en France à toutes les femmes est "une heureuse nouvelle". "Le fait d'être autre qu'hétérosexuelle doit être accepté. À Bruxelles, depuis le début des années 1980, nous avons pratiqué l'insémination artificielle avec spermes de donneurs. Aujourd'hui, des femmes lesbiennes viennent encore en grand nombre de France", a-t-il relevé. Cependant "En Belgique, nous n'avons jamais eu de pénurie de don de gamètes", a-t-il remarqué.
Les 22èmes Journées de la Fédération Française d'Etude de la Reproduction a réuni de mercredi à vendredi à Tours plus de 600 experts (gynécologues, biologistes, endocrinologues, urologues, andrologues et chercheurs) pour échanger sur les dernières avancées et les meilleures pratiques.