C’est une première pour l’islam de France : ce vendredi, tous les imams sont invités à tenir le même discours lors du prêche du vendredi. Une semaine après les attentats à Paris, cette explication de texte doit permettre de souligner "sans ambiguïté" que la religion musulmane condamne toute "forme de violence ou de terrorisme". Et que l’organisation Etat islamique n’a rien de religieux et pervertit le Coran.
Les imams invités à parler d’une même voix. Conscient que l’objectif de Daech est de favoriser les tensions entre les différents pans de la société française, le Conseil français du culte musulman (CFCM) a invité tous les imams de France à tenir le même discours ce vendredi. "Devant l'horreur des tueries aveugles qui ont été perpétrées" le 13 novembre à Paris, "le CFCM ainsi que l'ensemble des organisations musulmanes appellent toutes les mosquées de France à consacrer le prêche de vendredi prochain à ces évènements tragiques qui ont profondément touché la communauté nationale", précise l'instance représentative du culte musulman.
Le CFCM a donc diffusé auprès des quelque 2.500 mosquées de France "un texte solennel qui pourra servir de ligne directrice pour le prêche" : tous les imams de France sont censés tenir le même discours, une initiative inédite pour une religion qui ne dispose pas d’autorité centrale, du moins dans la branche sunnite majoritaire dans l’Hexagone.
"Un attachement indéfectible au pacte républicain". "Les musulmans de France réaffirmeront ainsi leur rejet catégorique et sans ambiguïté de toute forme de violence ou de terrorisme, qui est la négation même des valeurs de paix et de fraternité que porte l'islam", écrit le CFCM. Ils "proclameront également leur attachement indéfectible au pacte républicain qui nous unit tous, ainsi qu'aux valeurs qui font la France", poursuit le CFCM.
Enfin, "les musulmans élèveront des prières pour la France, avec tous leurs voeux de paix et de sécurité pour la patrie", comme ils l'avaient déjà fait après les attentats parisiens de janvier contre le journal Charlie Hebdo et un supermarché casher, et à l'image notamment de ce qui est pratiqué chaque semaine dans de nombreuses synagogues.
Un prêche pour démonter le mensonge Daech. Si chaque imam est libre de son discours, l’objectif est le même dans toutes les mosquées : faire un exercice pédagogique à destination des jeunes pour leur expliquer que Daech détourne le Coran et n’a de religieux que le nom.
"Ce qu’il s’est passé récemment va être traité de manière pédagogique pour essayer d’expliquer aux jeunes le point de vue de l’islam pour qu’ils ne tombent pas dans la même chose. Il faut contrecarrer les arguments utilisés par ces groupes puisqu’ils ramènent des versets coraniques, des supports prophétiques pour justifier ce qu’ils ont fait. Il faut aussi que de notre côté, en tant qu’imam, on explique que leur interprétation de l’islam est fausse", précise au micro d'Europe 1 Sofiane Séguié, imam à Aulnay-sous-Bois.
Et le responsable religieux de poursuivre : "par exemple, eux (Daech) parlent de faire le djihad sur toutes les personnes qui sont impies. Non, dans l’islam, le djihad a ses propres règles : on est dans le droit de défendre par exemple notre territoire quand on se sent envahi mais avec une certaine éthique. Quand par exemple un combattant fuit la guerre, on n’a pas à le tuer. Quand il y a un blessé en pleine guerre, on n’a pas à l’achever. L’impact du texte sur les personnes est fort : quand on arrive à leur donner la meilleure explication, je pense qu’à ce moment là les gens comprendront que ce qu’il se passe aujourd’hui n’a rien à voir avec ce qu’on qualifie de djihad ou de guerre sainte. C’est de la folie, du terrorisme qui s’applique sur des innocents".
Le rassemblement devant la grande mosquée de Paris annulé. Ce vendredi devait également être marqué par un rassemblement devant ce lieu de culte symbole de l'islam en France depuis les années 1920. "Tous les citoyens de confession musulmane et leurs amis" étaient invités à y exprimer vendredi à 14 heures "leur profond attachement à Paris, à sa diversité et aux valeurs de la République". Un rendez-vous annulé à la dernière minute : "après discussion avec les autorités de la préfecture de police de Paris, il apparaît que les conditions de sécurité indispensables à l'organisation d'un rassemblement public ne sont pas réunies", a précisé l'institution musulmane.