Au deuxième jour du procès en appel de la "chemise arrachée", un ex-dirigeant d'Air France est revenu mardi sur le "lynchage" dont il a réchappé et évoqué "l'humiliation" d'une agression dont les images ont fait le tour du monde.
Quatre prévenus comparaissent devant la cour d'appel de Paris pour des violences commises en octobre 2015 en marge d'une manifestation contre un projet de restructuration menaçant 2.900 emplois. Deux dirigeants avaient été pris à partie après l'envahissement d'une salle où se tenait un Comité central d'entreprise (CCE), au siège d'Air France à Roissy.
Revoir les images reste "difficile". Pierre Plissonnier, ex-responsable de l'activité long-courrier, a décrit devant la cour des "moments assez terribles", entre "sentiment de lynchage" et "humiliation", des termes employés à deux reprises. "On était poursuivis par la foule en permanence", "effrayés (...) par les cris" des manifestants, a rappelé l'ancien dirigeant d'Air France, obligé d'escalader un grillage, la chemise en lambeaux, pour échapper à ses poursuivants. Revoir les images de sa fuite, re-diffusées mardi devant la cour après avoir fait le tour du monde, "est quelque chose de toujours difficile", a-t-il dit.
"Arrêtons de parler de la chemise !". En première instance, trois ex-salariés ont été condamnés en novembre 2016 à des peines de 3 à 4 mois de prison avec sursis, et deux ont été relaxés. Le parquet a fait appel pour l'un d'eux. Le seul prévenu pour violence entendu mardi, suspecté d'avoir "frappé" Pierre Plissonnier dans le dos, a nié une nouvelle fois les faits. Décrivant une "situation tendue" dans la salle du CCE, "ça crie, ça se bouscule", il a assuré être "tombé sur un vigile" dans la cohue, sans avoir touché le dirigeant qui, quand "il quitte la salle, a toujours sa chemise". "À partir du moment où il est maîtrisé (par les vigiles), il ne peut pas arracher la chemise de Pierre Plissonnier", a enchéri son avocat, Sofiane Hakiki, s'attirant un rappel de la présidente. "Arrêtons de parler de la chemise !", a tonné cette dernière, enjoignant les différentes parties à se concentrer sur les faits jugés.
"Grille fermée" et "chasse à l'homme". Plus tôt, la cour avait poursuivi l'examen d'une requête initiée la veille par Lilia Mhissen, représentante de plusieurs prévenus. Selon l'avocate, la direction d'Air France s'est rendue coupable d'un délit en fermant la grille d'accès du siège d'Air France, le jour de la manifestation. Ce recours sert à "masquer la seule question" qui vaille: "Est-ce qu'ils (les prévenus) pouvaient ou non commettre des dégradations?", a répliqué un avocat d'Air France, Aurélien Boulanger. La défense n'a pas expliqué en quoi "faire une chasse à l'homme dans les couloirs de l'entreprise (...) participait à un piquet de grève", a-t-il insisté.
"On n'a tué personne, on n'a piétiné personne". "On n'a chassé personne, on n'a tué personne, on n'a piétiné personne", a répliqué un des huit prévenus qui comparaissent, eux, pour dégradations, également devant la cour d'appel. "Pour la grille tout le monde a reconnu les faits, on assume". L'audience reprendra mercredi sur le volet "violences".