Nicolas Hulot souhaite réintroduire à l'automne deux ours femelles dans les Pyrénées, a-t-il indiqué lundi au Parisien, une opération inédite depuis 12 ans qui risque de provoquer l'opposition des éleveurs.
Éviter la disparition d'une lignée d'ours. "Je souhaite engager la réintroduction de deux ours femelles dans les Pyrénées-Atlantiques à l'automne. Je vais demander au préfet d'organiser un dialogue pour réussir cette réintroduction", a déclaré le ministre de la Transition écologique.
"J'ai décidé de passer à l'offensive parce qu'il ne reste que deux mâles dans ce département, dont Cannellito, fils de Cannelle", dernière représentante de l'ours de souche des Pyrénées tuée par un chasseur en 2004, a-t-il ajouté. "Je ne veux pas être le ministre qui assiste à la disparition de cette lignée", a insisté l'ancien militant, précisant qu'à l'issue de la concertation, la France solliciterait plusieurs pays européens pour choisir les deux femelles.
Seulement deux ours dans les Pyrénées occidentales. En 1996-97, trois ours slovènes avaient été lâchés non loin de la frontière avec l'Espagne. Puis en 2006, cinq autres ours avaient été réintroduits. Le nombre d'ours est estimé à 39 dans les Pyrénées, selon les derniers chiffres officiels datant de 2016. Mais seuls deux mâles vivraient dans les Pyrénées occidentales, la grande majorité des individus ayant été recensés dans le centre du massif.
"Un bon signal." Pour Alain Reynes, le directeur de l’association de défense du plantigrade Pays de l’Ours-Adet, "cette décision est un bon signal puisque le gouvernement a décidé de ne pas laisser disparaître l’ours dans les Pyrénées. (...) Nous sommes aussi soulagés parce que nous attendions cette décision avec impatience. Après, la mesure prise par Nicolas Hulot ne sera pas suffisante pour restaurer une population viable à long terme".
Des éleveurs inquiets. Plus de vingt ans après la réintroduction, la présence du plantigrade pouvant peser jusqu'à 250 kilos et mesurant jusqu'à deux mètres dressés sur ses pattes arrière, et surtout la question sensible de nouveaux lâchers sur les versants français continuent de diviser. Les éleveurs protestent en particulier contre les attaques attribuées aux ours.
"On est prêts à défendre nos troupeaux." "On a essayé par plusieurs moyens d’alerter l’Etat, de chercher des solutions et de lui en proposer", assure Rémi Denjean, éleveur et porte-parole de l’Aspap, l'association pour la sauvegarde du patrimoine d'Ariège-Pyrénées. Avant de se montrer un peu plus menaçant : "Si l’Etat ne veut pas nous entendre, et c’est le cas aujourd’hui, ça va déclencher une guerre sur le terrain. Nous, on est prêts à défendre nos troupeaux et à se débarrasser des ours s’il le faut."
"Je comprends les craintes". "Je sais bien que c'est un dossier compliqué, mais je veux travailler avec eux", a indiqué Nicolas Hulot, demandant au préfet de mener un dialogue "qui doit aboutir à un accompagnement renforcé et une meilleure protection des troupeaux". "Je comprends les craintes", a ajouté le ministre qui s'est déjà attiré des critiques avec le récent plan loup qui limite l'abattage à 40 en 2018. Mais "on ne peut pas donner de grandes leçons aux pays qui ont sur le territoire d'emblématiques animaux sauvages menacés de disparition si l'on hésite nous-même à protéger les espèces qui sont en danger en France", a-t-il insisté.