Organisation, prise en charge "disparates" et balbutiantes : la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) Adeline Hazan dresse un bilan critique des premiers regroupements d'islamistes en prison, initiés après les attentats de janvier 2015 dans quatre prisons (Fresnes dans le Val-de-Marne, Lille-Annoeullin dans le Nord, Osny dans le Val-d'Oise et Fleury-Mérogis dans l'Essonne)
Des structures trop modiques. "La modicité des structures (...) ne paraît pas correspondre (...) au changement d'échelle" du phénomène au regard de la "hausse spectaculaire" du nombre des personnes impliquées dans des filières djihadistes syro-irakiennnes et des informations judiciaires ouvertes pour des faits de terrorisme, constatent les auteurs du rapport. Fin avril 2016, on estimait qu'"un millier de personnes venues de France ont été enrôlées" dans ces filières et que "244 sont revenues sur le territoire national".
Des lieux "pour reconstituer des réseaux". Adeline Hazan constate que l'argument initial de la lutte contre le prosélytisme en prison n'est plus mis en avant, au profit de la simple volonté d'organiser "une prise en charge adaptée des détenus radicalisés". Mais tous les détenus pour faits de terrorisme islamiste n'y sont pas et la contrôleure s'interroge sur les critères "pas clairement explicités" de l'administration pénitentiaire. D'abord exclus du processus, les juges antiterroristes ont obtenu en mars d'y être associés. Mais "certains magistrats continuent à s'inquiéter des effets pervers du regroupement qui permettrait de nouer des solidarités, de reconstituer des réseaux et laisserait toute latitude aux plus forts pour faire pression sur les plus vulnérables".
Dans les unités, les détenus bénéficient tous d'un encellulement individuel. Mais, pour le reste, les conditions de détention s'avèrent "disparates", soulignent les auteurs du rapport, et "l'étanchéité entre les quartiers d'un même établissement apparaît comme un vœu pieux".
Pas favorable à une extension. Dans ses conclusions, la contrôleure ne juge "pas réaliste (...) l'extension de ce modèle expérimental" dans le contexte "d'une surpopulation carcérale structurelle". Conscients de "défricher un monde complexe", des responsables d'établissement ont insisté sur le temps nécessaire à la mise au point de "ce qui pourrait être un modèle français". "Le pire, disent-ils, c'est que nous soyons jugés trop tôt."