Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a annoncé mercredi que les policiers seraient "sanctionnés" en cas de "faute" ou de mot raciste. Et alors qu'une manifestation interdite a rassemblé 20.000 personnes, mardi soir, en soutien à la famille d'Adama Traoré, le thème des violences policières à l'encontre des personnes racisées ressurgit dans le débat public. Mais qu'en est-il vraiment ? Europe 1 fait le point en trois questions.
Y a-t-il réellement des violences racistes de la part de la police en France ?
Personne ne comptabilise les "violences racistes" qui seraient commises par des policiers, pas plus que par des pompiers ou des contrôleurs SNCF. En revanche, il y a bien d’un côté des enquêtes pour des propos racistes ou discriminatoires tenus par des policiers, et de l'autre des enquêtes pour ce que certains appellent "violences policières" ou un emploi de la force injustifié. Le ministre de l'Intérieur récuse d'ailleurs ce terme.
Combien d'enquêtes sont-elles menées chaque année ?
Il y a très peu d'enquêtes judiciaires pour "discrimination ou racisme" contre des policiers. En 2019, l'IGPN a été saisie une trentaine de fois, contre 46 enquêtes en 2018. Rappelons qu'au total, il y a 146.000 policiers.
Concernant les enquêtes pour violences volontaires, les chiffres de 2019 ne sont pas encore connus. On sait qu’ils sont très élevés, à cause des manifestations des "gilets jaunes". En 2018, par exemple, 612 enquêtes judiciaires confiées à l’IGPN ont été dénombrées.
Comment expliquer cette différence de ressenti entre les témoignages de la rue et le nombre d’enquêtes ?
Principalement, parce que les victimes de racisme vont très rarement porter plainte ou saisir la justice. Elles pensent (à tort ou à raison) que ça ne sert à rien. Pourtant, quand il y a une vidéo notamment, il y a enquête. Fin avril, un policier des Hauts-de-Seine a été suspendu après avoir été filmé en qualifiant de "bicot" un jeune fuyard repêché dans la Seine.
Tous les ans, des policiers sont sanctionnés. Mais globalement, ce sont des affaires qui restent rares, alors que les policiers sont de plus en plus filmés, partout, tout le temps. Eux-mêmes, pour certains, ont des caméras piéton, pour filmer les contrôles et éviter les abus des deux côtés.
Il n’empêche, il y a un ressenti de la part d’une partie de la population, jeune, urbaine, qui se sent stigmatisée. Et il peut se baser sur des événements difficilement mesurables. D’après une étude nationale du Défenseur des droits, en 2017, les jeunes hommes "perçus comme noirs ou arabes" sont vingt fois plus contrôlés que la moyenne.