JO de Rio 2016 : une combinaison d’escrime protège-t-elle vraiment ?

Souple et intransperçable, les caractéristiques d'une combinaison d'escrime.
Souple et intransperçable, les caractéristiques d'une combinaison d'escrime. © FABRICE COFFRINI / AFP
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Antoine Mignan
L’ancien entraîneur de l’équipe de France olympique de fleuret nous dit tout sur l’équipement des escrimeurs et ses normes de sécurité.

Fleuret, épée, sabre… A quelques jours des Jeux olympiques (5-21 août), Rio s’apprête à vibrer au son métallique des combats d’escrime. Des duels armés parfois très physiques et pleins d’engagement, et donc potentiellement dangereux pour un sportif non protégé par un équipement sécurisé. Mais d’ailleurs, en quoi consiste exactement la combinaison de l’escrimeur ? La discipline est-elle vraiment sans risque ? Stéphane Marcelin, cadre technique de la fédération française d’escrime et ancien entraîneur de l’équipe de France olympique de fleuret, nous éclaire sur la question.

L’équipement parfait d’un "tireur" - c’est comme cela qu’on appelle le combattant à l’escrime - a vite fait de balayer le moindre doute sur les risques de blessure. Veste et pantalon en kevlar intransperçable, gant en cuir bien épais sur la main armée, masque au grillage renforcé, la tenue d’escrime est une véritable armure. "Le masque est tellement solide que même en sautant dessus à pieds joints, vous ne réussirez pas à le plier", confie Stéphane Marcelin, qui s’occupe du contrat avec l’équipementier de l’équipe de France olympique.

" Les femmes mettent un protège-poitrine en plastique, certains hommes un bustier plat. "

Mais ce n’est pas tout. En plus de la combinaison "visible", les tireurs portent des protections plus solides sous leur tenue. Sur la partie latérale du corps située du côté où l’athlète porte l’arme, les combattants enfilent une cuirasse supplémentaire obligatoire, ainsi qu’une veste électrique visant à détecter les touches (seulement pour le fleuret et le sabre). A tout cet attirail s’ajoutent des protections facultatives. "Les femmes mettent un protège-poitrine en plastique", détaille l’ancien entraîneur national. "Certains hommes utilisent aussi un bustier plat, ou une protection à l’entre-jambes, même si cela reste très rare."

Malheureusement, ces normes de sécurité n’ont pas toujours existé. "Les tenues en kevlar ne sont apparues qu’à la fin des années 1970", se souvient Stéphane Marcelin, qui a vécu cette transition matérielle. "Avant les années 1950, l’équipement était fait dans un coton très épais, puis sont venues des tenues à tissu plus souple." Plus confortable, mais bien loin de protéger l’escrimeur à 100 %.

" Les lames sont en acier "maraging", elles ne cassent pratiquement jamais. "

Il aura fallu un drame pour encourager la fédération internationale à prendre des mesures de sécurité. En 1982, le fleurettiste soviétique Vladimir Smirnov, champion olympique à Moscou en 1980, champion du monde en 1981, se fait transpercer par une lame brisée en plein combat et décède quelques jours plus tard. "Son masque avait un défaut dans la maille, la lame a traversé son cerveau", se rappelle Stéphane Marcelin.

 

C’est à la suite de cet incident, puis de l’énorme frayeur du Français Philippe Conscience, transpercé à l’aine en 1985, que la fédération internationale a mis en place des normes de sécurité dans l’équipement et dans les armes. "Un masque renforcé, une combinaison en kevlar intransperçable, ainsi que des lames en acier 'maraging' qui ne cassent pratiquement jamais", résume l’ancien entraîneur national. Évidemment, tout est contrôlé dans le moindre détail avant chaque compétition, de la résistance de la veste à la date d’expiration des lames. "Un tampon est imprimé sur chaque accessoire à l’issue du contrôle, et l’escrimeur ne peut pas se présenter vêtu d’équipements qui ne porteraient pas cette marque, au risque de prendre un carton rouge d’entrée (un point de pénalité, ndlr)", détaille Stéphane Marcelin.

" Sur les parties vitales, il n'y a plus aucun problème. "

Risque zéro, vraiment ? Aujourd’hui, les escrimeurs peuvent donc combattre sans inquiétude. Toutefois, Stéphane Marcelin préfère prévenir : "Comme dans chaque sport de haut niveau, le risque zéro n’existe pas." Des blessures peuvent en effet toujours survenir dans les zones non-protégées du corps, comme au niveau de la main non-armée par exemple. "Mais il n’y a plus aucun danger de transperçage", tempère l’ex-tireur. "Sur les parties vitales, il n’y a plus aucun problème." Nous voilà rassurés.