Sur le circuit, le petit bolide émet un bruit d'avion au décollage. 100% électrique, ce prototype de sport "made in France" a suffisamment d’autonomie pour disputer, à terme, les 24 Heures du Mans. Le secret de cette voiture révolutionnaire réside dans le carburant utilisé : elle est alimentée par une pile à hydrogène. Europe 1 a pu monter à bord de cette voiture-laboratoire lors d’une session d’essais privés organisés cette semaine sur le circuit de Lurcy-Lévis, dans l’Allier.
Un volant qui ressemble à une console de jeux
Mieux vaut être souple et mince pour se glisser à l’intérieur : l’habitacle au ras du sol est celui des prototypes qui disputent les 24 Heures du Mans. Devant le pilote, uniquement des boutons, des cadrans et un volant qui ressemble à une console de jeux. Près du cockpit, trois diodes de couleurs sont installées. "Le vert tout va bien, le jaune c’est potentiellement une fuite d’hydrogène, et le rouge un problème d’isolation sur la voiture. Là, il y a danger. Il n’y pas de quoi s’affoler. Il faut juste suivre les instructions et s’extraire du cockpit en sautant pieds joints sur le sol, pour éviter de faire contact entre la voiture et la terre, au risque de prendre une décharge", explique Norman Nato pilote de développement.
Lancé à pleine vitesse, le prototype frôle les 300 km/h. Il est capable aussi de passer de 0 à 100 km/h en 3,4 secondes, avec une puissance max de 480 kW, soit plus de 650 chevaux. Son principal défaut, c'est son poids. Toujours en phase de développement, la voiture pèse encore quelque 1.400 kg.
Un prototype plus léger déjà conçu
GreenGT, la société conceptrice, installée dans le Var et en Suisse, est associée à l’Automobile Club de l’ouest, organisateur des 24 Heures du Mans, pour ce programme nommé Mission H24. "La grande innovation, c’est qu’une voiture électrique-hydrogène comme celle-ci a la même autonomie et la même puissance qu’un moteur thermique, et ne rejette que de la vapeur d’eau, issue de la transformation de l’hydrogène", affirme Jean-Michel Bouresche, responsable des opérations.
L’idée est qu’en 2024, une catégorie réservée à ce type de véhicule puisse disputer la célèbre course d’endurance mancelle. Un nouveau prototype est d’ailleurs déjà conçu, plus léger que l’actuel et bénéficiant d’amélioration aérodynamique notable. "La marge de progression est très importante", se réjouit Jean-Michel Bouresche, de GreenGT. Les premiers roulages du nouveau prototype sont programmés le mois prochain, en décembre. Sur le même principe, un camion de transport va être présenté très prochainement par GreenGT. Il serait capable de faire 500 km sans ravitailler. Le secteur de la grande distribution est cette fois ciblé.
Comment fonctionne une pile à hydrogène ?
"Une pile à combustible, c’est un générateur d’électricité", résume Jean-Michel Bouresche, l’un des responsables du programme Mission H24. A la différence d’une batterie classique, "on ravitaille en trois minutes, et pas en plusieurs heures". Une plaquette de présentation du programme détaille le fonctionnement : "Les molécules de dihydrogène (H2, stockée dans les réservoirs) et les atomes d’oxygène (O, présent dans l’atmosphère), s’assemblent pour former des molécules d’eau (H2O). Cette réaction a deux conséquences : un dégagement de chaleur et la production d’électricité qui alimente les moteurs électriques de la voiture."
Pour fournir l’hydrogène au prototype, Total a créé une station mobile. Elle serait unique au monde selon le pétrolier qui multiplie les activités dans le domaine de l’énergie. La station mobile est installée dans un container maritime. "Le cœur de station est dans la partie compression", explique Romain Aubry du programme compétition de Total, car "l’hydrogène à température ambiante c’est un gaz, donc si on veut l’utiliser, si on veut en stocker suffisamment, il faut le comprimer", c’est-à-dire "rapprocher les molécules de gaz" pour rendre l’hydrogène plus compact. Un tuyau permet alors de ravitailler la voiture en à peine 3 minutes.
Les caractéristiques techniques du prototype :
4 moteurs électriques
3 réservoirs d’hydrogène
Pas de boîte de vitesse, pas d’embrayage
Pas de frein à main
Une batterie électrique complémentaire pour offrir plus de puissance