La crise du Covid a mis en lumière les "faiblesses structurelles" des Ehpad, et la nécessité d'une réforme que le gouvernement a "trop longtemps reportée", estime la Cour des comptes, en pleine tempête dans le secteur après la parution d'un livre-enquête sur les maltraitances dans ces structures.
Le lourd bilan de l'épidémie dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes - près de 34.000 morts entre mars 2020 et mars 2021, sur une population totale d'un peu plus de 600.000 personnes - ne s'explique "pas seulement par la fragilité des résidents", mais également par les "difficultés structurelles des Ehpad", analysent les Sages.
De "notables faiblesses" dans la prise en charge
"Le niveau de dépendance des personnes concernées s'accroît, tout comme leurs besoins médicaux", or leur prise en charge sanitaire présente de "notables faiblesses", relève le rapport : beaucoup d'établissements n'ont pas de médecin coordonnateur, tout en souffrant d'une pénurie de médecins de ville à proximité, et la plupart peinent à recruter et fidéliser un nombre suffisant d'aide-soignants et d'infirmiers. Cette pénurie "peut susciter de réels problèmes de qualité de prise en charge, hors situation de crise", selon la Cour des comptes.
Pendant l'épidémie de Covid-19, l'Etat et l'Assurance maladie ont apporté un soutien financier massif au secteur, y compris via des dispositifs pérennes, comme les augmentations de salaire décidées dans le cadre du "Ségur de la Santé" - mais qui bénéficient aussi au personnel non soignant, note la Cour. Cet effort financier "aurait pu être l'occasion pour l'État d'engager des réformes structurelles trop longtemps différées. "Tel n'a pas été le cas", déplore la Cour, sans évoquer spécifiquement le renoncement du gouvernement à présenter une loi spécifique sur ce sujet avant la fin du quinquennat.
Une refonte du système des Ehpad
Pour améliorer la prise en charge des personnes âgées, le rapport préconise d'agir sur les conditions de travail des personnels (notamment en ce qui concerne la formation, l'évolution des carrières et la prévention des accidents du travail), mais aussi de mieux articuler Ehpad et filières de soins. Les Ehpad ne doivent pas rester "isolés" mais "s'insérer dans un ensemble fonctionnel plus vaste, soit par adossement à un établissement de santé, soit par l'appartenance à un groupe, soit encore par la mutualisation de certaines fonctions", propose encore la Cour des comptes.
Ce rapport est publié au moment où le secteur est bousculé, après la parution en janvier de "Les Fossoyeurs", un livre enquête qui dévoile des maltraitances au sein des Ehpad du groupe Orpea. Répondant à ces critiques, un communiqué de la ministre déléguée à l'Autonomie, Brigitte Bourguignon, rappelle que "le gouvernement s'est mobilisé dès l'été 2020 dans une réforme structurelle des Ehpad afin de mettre fin à la vétusté et la faible médicalisation des établissements".
Le gouvernement souligne également avoir "lancé en septembre 2020 un vaste plan en faveur de l'attractivité des métiers du grand âge", en particulier à travers des revalorisations salariales, et que le dernier budget de la sécurité sociale prévoit "10.000 postes de personnels soignants supplémentaires" en plus des "10.000 déjà recrutés depuis 2017".