Le ministère des Finances dévoile mercredi sa nouvelle trajectoire de finances publiques, avec probablement un nouveau dérapage du déficit à 5% du PIB ou plus cette année, de quoi faire craindre à une partie de l'opposition "un plan caché sur les impôts des Français." Selon Les Échos et L'Opinion, le déficit public (solde des déficits et excédents de l'État, de la Sécurité sociale et des Collectivités locales) sera de 5% voire 5,1% du PIB pour 2024 dans le nouveau programme de Stabilité de Bercy, au lieu de 4,4% espérés.
Il avait déjà sévèrement dérapé à 5,5% au lieu des 4,9% prévus en 2023, en raison principalement de recettes moindres qu'attendu. La semaine dernière, sur La chaîne parlementaire, le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale Jean-René Cazeneuve avait jugé "très probable que l'objectif de 4,4% en 2024 ne soit plus du tout l'objectif prévu" dans le nouveau programme.
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Mécontentement à l'Élysée
En février, pour rétablir d'urgence la situation, le ministre de l'Économie et des Finances Bruno Le Maire avait annoncé dix milliards d'euros d'économies sur le budget de l'État cette année : c'est le maximum qui pouvait être taillé par décret, sans avoir à passer par une loi de finances rectificative au Parlement. Selon Les Échos, information confirmée à l'AFP, Bruno Le Maire a fait passer à plusieurs parlementaires ce week-end un message en vue de la mise en place d'une telle loi de finances rectificative.
Mais cette initiative, assure Les Échos, a fortement mécontenté le président de la République Emmanuel Macron et le Premier ministre Gabriel Attal, qui ne sont pas sur cette ligne. Faute de pouvoir prendre des mesures d'économies plus drastiques que les 10 milliards, il est logique que le déficit se résorbe très peu cette année, où la croissance n'est de surcroît attendue qu'à 1%. Pour 2025, le gouvernement a déjà annoncé 20 milliards d'économies sur l'ensemble des trois postes (État, Sécu, collectivités).
"Un plan caché"
Les collectivités semblent récalcitrantes et ont expliqué mardi à Bruno Le Maire, lors d'une réunion à Bercy, qu'elles avaient déjà "largement donné". Il n'est par ailleurs toujours pas question d'augmenter les impôts pour combler le trou, comme Gabriel Attal et Bruno Le Maire l'ont répété en chœur mardi lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale.
"Nous ne voulons pas augmenter les impôts des Français, pas pour 'faire des cadeaux aux riches' mais parce que la stabilité fiscale permet aux entreprises d'investir, de créer des emplois, de relancer la puissance économique française", a affirmé Bruno Le Maire. Gabriel Attal a cependant lancé la semaine dernière une "task-force" parlementaire chargée de faire des propositions pour taxer "les rentes", notion encore à définir.
De quoi inciter une partie de l'opposition à dénoncer un double discours du gouvernement. "On sait déjà que le gouvernement a menti (…) pour le budget 2024, on a le sentiment qu'il nous ment encore sur les mesures qu'il compte proposer", s'est agacé mercredi Olivier Marleix, président du groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale, sur franceinfo. "Un budget c'est comme un barbecue, vous avez un type qui le fait puis tout le monde autour qui donne son avis", a ironisé mercredi l'ex-ministre des Transports Clément Beaune sur France 2, pour qui "il n'y a pas lieu d'agiter des peurs."
La croissance scrutée
Pour réduire le ratio du déficit public, le gouvernement, outre les économies et la taxation des rentes, n'a plus qu'à espérer que le dénominateur du déficit public, c'est-à-dire le PIB, augmente fortement dans les prochaines années. Bercy prévoit jusqu'à présent une croissance à 1,7% pour 2025 et 2026, et 1,8% en 2027. La semaine dernière, Bruno Le Maire a prédit devant des entrepreneurs "un vrai élan économique puissant en 2025 et 2026".
Après la divulgation de ses principales hypothèses mercredi, celui-ci sera présenté en conseil des ministres le 17 avril, et débattu au Parlement les 29 et 30 avril, ont annoncé le ministre du Budget Thomas Cazenave, et Bruno Le Maire.