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Agriculture : le Sénat ouvre la voie à la réintroduction de néonicotinoïdes

Europe 1 avec AFP . 3 min

Ce lundi, le Sénat a ouvert la voie à la réintroduction en France de pesticides néonicotinoïdes autorisés ailleurs en Europe. Il s'agit d'une mesure vivement critiquée à gauche, moins catégoriquement par le gouvernement.

Pour apaiser un secteur en colère, le Sénat a ouvert la voie lundi à la réintroduction en France de pesticides néonicotinoïdes autorisés ailleurs en Europe, une mesure vivement critiquée à gauche, moins catégoriquement par le gouvernement. "Un retour en arrière de plus de dix ans" ou "un compromis vertueux pour les filières en crise" ? Dans un climat parfois tendu dans l'hémicycle, les sénateurs ont franchi un cap dans les mesures de soutien au monde agricole.

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A quelques semaines du salon de l'agriculture, prévu à partir du 22 février à Paris, la chambre haute a en effet voté pour permettre la réintroduction, à titre dérogatoire et exceptionnel, de l'acétamipride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes interdit en France depuis 2018 mais autorisé ailleurs en Europe jusqu'en 2033. Nocive pour les pollinisateurs, cette substance reste utilisée dans l'Union européenne notamment sur la betterave ou la noisette. Ces filières dénoncent une "surtransposition" française qui les affaiblirait face à leurs concurrents, y compris européens.

La droite sénatoriale avait initialement souhaité lever complètement cette interdiction, mais elle a finalement proposé une rédaction moins épidermique pour le gouvernement. L'acétamipride pourrait ainsi être à nouveau autorisé par décret, à titre "dérogatoire", "exceptionnel" et pour une durée limitée, sous certaines conditions comme l'engagement de la filière dans "un plan de recherche d'alternatives".

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"Filières dans l'impasse"

Cette mesure a nettement ravivé les clivages au Sénat, la gauche dénonçant "un retour en arrière de plus de dix ans", qui fait la part belle au "primat de l'économie sur la sécurité et la santé publique". Cette dérogation est "vertueuse" car "limitée dans le temps", a salué l'autre auteur du texte, le centriste Franck Menonville, saluant un compromis qui "cible les filières dans l'impasse et en crise".

La ministre de l'Agriculture Annie Genevard a de son côté évoqué une "dérogation strictement proportionnée", après avoir dit l'opposition du gouvernement à la réintroduction pure et simple de cette substance. Elle a finalement rendu un "avis de sagesse" sur la rédaction de compromis du Sénat, ni favorable ni défavorable. Un signe d'ouverture qui promet de nouveaux débats agités lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale dans les prochaines semaines. Les chances de survie de cette mesure dans la navette parlementaire dépendront beaucoup du vote des députés macronistes, entre une gauche férocement opposée et une extrême droite en soutien.

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"Ce texte ouvre une nouvelle page de l'agriculture française, une page qui permet de voir l'avenir en étant plus objectif, plus rationnel", a pour sa part salué Laurent Duplomb (LR), l'un des auteurs de cette proposition de loi visant à "lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur". Le texte dans son ensemble a été adopté très largement dans la nuit au Sénat à 233 voix contre 109. Les Jeunes Agriculteurs et la FNSEA, les principaux syndicats agricoles, ont salué dans un communiqué une "proposition de loi ambitieuse" qui doit "apporter des réponses concrètes". 

"Attaque contre l'environnement"

La Confédération paysanne, troisième syndicat, est de son côté opposée à ce texte sensible, comme nombre d'associations environnementales. Dans un communiqué, Greenpeace a ainsi dénoncé "une attaque contre l'environnement et l'avenir de l'agriculture".

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Des compromis gouvernement-Sénat ont par ailleurs émergé sur les autres mesures du texte: facilitation de construction de réserves d'eau, assouplissement dans la séparation entre activités de vente et de conseil pour les produits phytosanitaires, épandage de phytos par drone... Ou encore, une évolution dans le fonctionnement de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), chargée de prononcer une autorisation de mise sur le marché. L'autorité se verrait ainsi encouragée à "prioriser" les dossiers liés aux filières les plus menacées.

Le travail de la Haute assemblée sur les textes agricoles ne fait que commencer: à partir du 4 février, les sénateurs s'attaqueront en effet au projet de loi d'orientation agricole, maintes fois reporté. Adopté par l'Assemblée nationale au printemps, il a été suspendu puis repoussé, par la dissolution puis la censure du gouvernement Barnier. Il vise notamment à ériger l'agriculture au rang "d'intérêt général majeur" et prévoit diverses mesures pour l'enseignement et la transmission d'exploitations.

Ces enjeux parlementaires accompagnent également un rendez-vous clé pour le secteur: la clôture du scrutin pour les élections aux chambres d'agriculture, prévue le 31 janvier.