La libération prochaine de Gilad Shalit a été annoncée mardi en échange de la libération de plus d’un millier de prisonniers palestiniens. Le soldat israélien de 25 ans, détenu par le Hamas à Gaza depuis cinq ans, devrait regagner Israël dans les prochains jours. Cet accord surprise soulève de nombreuses questions.
Que sait-on des tractations ? L’accord officialisé mardi entre le gouvernement israélien et le Hamas pour la libération de Gilad Shalit est le fruit d’une médiation menée par l’Egypte et l’Allemagne.
Les négociations se sont tenues au siège des services de renseignements égyptiens entre une délégation du Hamas, conduite par Ahmad al-Jaabari, chef des Brigades Ezzedine al-Qassam, et des responsables israéliens. L’accord a été "paraphé jeudi et signé définitivement aujourd'hui", a précisé mardi soir Benjamin Netanyahou.
Les premières traces de la négociation qui vient d’aboutir remontent à juillet 2010. En juin dernier, la presse égyptienne avait fait état d’une "percée" dans les négociations. L’information avait été démentie par Benjamin Netanyahou.
Pourquoi maintenant ? Au lendemain de l’enlèvement de Gilad Shalit le 25 juin 2006, la branche armée du Hamas avait exigé la libération de femmes et de mineurs détenus en Israël en échange d’informations sur le soldat. En réponse, Ehud Olmert, le Premier ministre de l’époque, avait exclu toute libération de Palestiniens, entraînant un gel des négociations.
Le "coup de théâtre" de mardi soir est né de "la volonté de Natanyahou de trouver un lien avec l'opinion publique modérée" en Israël et des bouleversements au sein du Hamas, selon l'éditorialiste Alexandre Adler. "Le Hamas ne dépend plus des Syriens ni des Iraniens" qui poussaient à l'intransigeance. "Aujourd'hui, ce sont les Frères musulmans du Caire qui sont les inspirateurs de la politique du Hamas, et donc probablement de sa flexibilité", précise Alexandre Adler.
Quel rôle a joué la France ? La France a affirmé par la voix d’Alain Juppé avoir œuvré à la libération de Gilad Shalit. "Nous nous sommes fortement engagés pour convaincre les deux parties de parvenir à cet accord", a déclaré mercredi le ministre français des affaires étrangères sur France Info.
Quels sont les termes de l’accord ? L'accord prévoit la libération de plus d'un millier de prisonniers palestiniens en échange de la libération de Gilad Shalit. Selon Khaled Méchaal, le chef du Hamas, 1.027 détenus palestiniens dont 27 femmes seraient concernés. 450 seront libérés en même temps que Gilad Shalit et 550 suivant deux mois plus tard.
Côté israélien, on précise que sur ce premier groupe de 450, 203 prisonniers palestiniens seront libérés et transférés dans des pays tiers, 110 autres rentreront chez eux, en Cisjordanie ou à Jérusalem-Est, et 131 dans la bande de Gaza. Les six derniers sont des Arabes israéliens.
Marouane Bargouthi sera-t-il libéré ? Une incertitude porte sur la présence ou non de Marouane Barghouti sur la liste des détenus palestiniens libérables. Selon le chef du contre-espionnage israélien, Marouane Barghouti, dirigeant charismatique du Fatah condamné à perpétuité pour meurtre, n'est pas concerné par l'accord. De même qu'un autre activiste palestinien de premier plan, Ahmed Saadat, jugé coupable d'avoir ordonné l'assassinat d'un ministre israélien
Quand Gilad Shalit sera-t-il vraiment libéré ? Aucune date précise n’a été donnée pour la libération de Gilad Shalit. Selon l'agence officielle égyptienne Mena, l’échange "va se faire d'ici deux jours". Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a lui indiqué mardi soir que Gilad Shalit pourrait regagner son foyer "dans quelques jours". Sans plus de précisions.
Est-ce le début d’une nouvelle ère au Proche-Orient ? L’accord conclu mardi constitue par son ampleur une première dans les relations entre Israël et le Hamas. Jamais jusqu'ici Israël n'avait échangé autant de prisonniers pour libérer un soldat. Ainsi, "le Hamas devrait se servir du dénouement de l'affaire Shalit pour se replacer au centre du jeu politique", estime Benjamin Barthe sur lemonde.fr.
Pour Didier François, chef du service Etranger d’Europe 1, l’échange de plus d’un millier de prisonniers palestiniens contre un soldat israélien est "un énorme succès pour les islamistes". "Le Hamas aura beau jeu de faire valoir qu’il a obtenu bien plus par la fermeté et le chantage que les dirigeants nationalistes modérés par la négociation", conclut-il.
Le Fatah, le parti du président palestinien Mahmoud Abbas, qui avait frappé un grand coup la demande de reconnaissance de la Palestine par les Nations Unies va désormais devoir composer avec ses rivaux du Hamas. Les deux parties avaient signé leur réconciliation lors d'un accord au Caire en mai dernier. Une réconciliation qui n'a jusqu'à présent pas permis d'avancée significative quant à la création d'un gouvernement transitoire unitaire en Palestine.