La déception sera-t-elle partagée ? Alors que Nicolas Sarkozy est arrivé vendredi en Turquie pour une visite consacrée aux priorités de la présidence française du G20, c’est la crise en Libye qui risque de s’imposer dans les discussions entre le président français et le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan.
Ce dernier espérait, de son côté, pouvoir aborder le sujet, délicat, de la candidature turque à l'Union européenne. Mais le sujet devrait également être relégué au second plan des discussions.
La Turquie, un modèle de démocratie ?
Les dirigeants français et turcs confronteront leurs points de vue sur les mouvements populaires qui ont provoqué la chute des présidents tunisien et égyptien Zine ben Ali et Hosni Moubarak et menacent du même sort le Libyen Mouammar Kadhafi. Le fait que la démocratie turque soit aujourd'hui érigée en modèle pour le Proche-Orient en ébullition donne une actualité forte à cette visite, souligne-t-on côté français.
"La Turquie est un Etat laïc et en même temps, le parti au pouvoir s'y réclame de l'islam. Voilà une grande démocratie où l'islam a toute sa place", déclarait mercredi Jean-David Levitte, le conseiller diplomatique du chef de l'Etat. L'implication d'Ankara dans le processus de paix au Proche-Orient et ses tentatives de médiation, jusqu'ici infructueuses, entre l'Iran et l'Occident dans le dossier du nucléaire de la République islamique seront également évoqués.
Le G20 au menu, quand même
Mais c'est avant tout en tant que président en exercice du G20 que Nicolas Sarkozy se déplace en Turquie, dans le cadre des consultations qu'il mène depuis novembre pour faire avancer les objectifs ambitieux qu'il s'est fixés. De source française, on attend plus particulièrement son soutien sur deux sujets - la lutte contre la volatilité des cours des matières premières, notamment agricoles, et la réforme du système monétaire international.
Sur le deuxième point, on relève que la Turquie figure au nombre des économies émergentes qui, de par leur fort potentiel de croissance, sont confrontés à des afflux de capitaux spéculatifs très volatils et donc difficiles à gérer. Le Fonds monétaire international s'en est inquiété récemment et a pressé le pays d'agir, en remontant ses taux d'intérêt si nécessaires, pour calmer une demande intérieure trop forte.
Une visite trop brève au goût d’Erdogan
En invitant au printemps dernier Nicolas Sarkozy à venir en Turquie, Recep Tayyip Erdogan avait déclaré espérer que sa visite, la première d'un président français depuis 1992, lui permettrait de changer sa vision du pays et partant, son opposition farouche à son adhésion à l'UE. La brièveté du séjour du président français, qui ne dépassera pas six heures, ne va pas dans le sens de ces attentes.
Le Premier ministre turc Tayyip Erdogan a d'ailleurs critiqué la caractère bref de cette visite, dont il a regretté qu'elle soit seulement effectuée au titre de la présidence française du G20. "Donc, je pense que ce n'est pas une visite qui est à la hauteur de l'amitié entre la France et la Turquie", a-t-il dit jeudi. "La Turquie et les relations turco-françaises méritent mieux que cela." Les relations économiques franco-turques ne seront pas au menu et la délégation accompagnant Nicolas Sarkozy ne comprendra qu'un ministre, Bruno Le Maire.