Attentats de Bruxelles : la Belgique face à ses failles

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Une commission d’enquête parlementaire commence à se pencher sur les failles du systèmes.

Pour les Belges, le moment est venu de tirer les leçons des attentats du 22 mars. Depuis lundi, une commission d’enquête parlementaire se penche sur les défaillances qui entourent les attaques perpétrées à l’aéroport et dans le métro de la capitales belge. Pendant plusieurs mois, les députés vont passer au peigne fin le déroulé des événements et la réponse fourni par les services de renseignements et les forces de l’ordre, afin de déterminer les responsabilités de chacun – s’il y en a – dans cette affaire.

  • Sur quoi va se pencher la commission ?

Les travaux du groupe d’enquête s’articulent autour de trois grandes thématiques :

- Les questions des premiers secours : la commission va étudier la réponse apportée par les policiers et les hôpitaux au moment des attaques. Il s’agit du volet du dossier qui pose, a priori, le moins de problèmes, car il n’y a eu aucune polémique sur ce sujet.
 
 - Le fonctionnement des services de police et de renseignements. Sur ce point, la commission d’enquête devra déterminer s’il y a eu ou non des problèmes de communication entre les services. L’objectif, ici, sera de savoir si tout a été fait pour éviter ces attentats. Pour cela, les parlementaires devront, notamment, aborder le sujet des informations non transmises sur l’un des frères El Bakraoui, qui avait été expulsé de Turquie vers la Belgique ou encore sur Salah Abdeslam qui a réussi à se cacher pendant quatre mois à Molenbeek.

- La montée de la radicalisation en Belgique. Le quartier de Molenbeek est devenu un des berceaux du terrorisme en Europe. La commission va donc devoir réfléchir à ce qui a permis à ce phénomène de s’installer. Il s’agit d’un volet presque exclusivement politique.

Le calendrier actuel prévoit que la commission rendra ses conclusions à la fin de l’année 2016. L’objectif n’est pas de mener une enquête judiciaire, mais de formuler des recommandations pour améliorer le système belge.

  • Comment est-elle organisée ?

La commission est composée de 17 députés, représentatifs de la répartition des formations politiques au Parlement fédéral. Le groupe est présidé par l’ancien ministre de l’Intérieur belge Patrick Dewael. Les membres de la commission se réuniront tous les lundis après-midi et les mercredis toute la journée, au Parlement. Certaines séances auront lieu à huis clos pour protéger l’enquête judiciaire, avec laquelle la commission devra veiller à ne pas interférer.

"Ces députés seront aussi accompagnés par quatre experts, pour les aiguiller dans leur enquête", explique Antoine Clevers, journaliste politique pour la Libre Belgique, contacté par Europe 1. "Mais il y a une polémique autour de la désignation de deux de ces experts", ajoute-t-il. En effet, les deux hommes ont travaillé sur la note de sécurité globale que le gouvernement devrait présenter d’ici l’été. Certains parlementaires se sont donc interrogés sur l’impartialité de ces experts dans l’accompagnement des travaux de la commission. De plus, l’un d’eux a travaillé sur la réforme de la police, actuellement appliquée. "Cela va donc revenir, pour lui, à critiquer son propre travail", résume Antoine Clevers.

Finalement, les députés ne voulant pas bloquer le lancement de la commission, ont obtenu de pouvoir demander une contre-expertise, à n’importe quel moment au cours de l’enquête, en cas de doute. Une manière de contrebalancer les pouvoirs très étendus de ces 17 parlementaires qui pourront convoquer qui ils souhaitent ; mais aussi avoir accès à des documents classifiés.  

  • Qu’en attendent les Belges ?

Pour le journaliste Antoine Clevers, les Belges veulent comprendre ce qui s’est passé et pourquoi cela s’est passé. Il existe une attente sur l’annonce de mesures concernant les dysfonctionnements des services de police.

Après l’affaire Dutroux, par exemple, la commission d’enquête parlementaire avait construit les fondations de la nouvelle architecture de la police actuelle. Les travaux des parlementaires avaient donc permis de tout remettre à plat. "Cela avait fait naître un nouvel organigramme tout à fait salutaire à l’époque", souligne le journaliste de La Libre Belgique.

La commission "attentats" débouchera donc peut-être, elle aussi, sur une nouvelle architecture pour les services de renseignements.

  • Quels sont les écueils possibles ?

C’est sur le plan politique que les choses risquent de se corser. Pour La Libre Belgique, la sérénité de l’enquête pourrait être perturbée par les enjeux politiques actuels dans le pays. "Il est à craindre que la commission se transforme en arène : les partis de l’opposition disposent désormais d’un nouvel espace - la commission - d’où ils pourront tenter de déstabiliser le gouvernement Michel", peut-on lire mardi dans le quotidien.

Les parlementaires vont pouvoir remonter assez loin dans le temps, notamment sur le sujet de la radicalisation. "Mais ce sont des éléments difficilement palpables", estime Antoine Clevers, qui craint que ce volet de l’enquête ne vire au règlement de comptes. "On sent une volonté politique de mouiller les uns et les autres qui auraient intentionnellement fermé les yeux". Potentiellement, tous les partis belges pourraient être éclaboussés.