Bains douches, Bataclan, Rex Club, New Morning, mais aussi Bercy ou le Grand Palais : au cours de sa carrière, Prince a écumé toutes les grandes salles de concerts parisiennes. Le chanteur, monument de la pop américaine, mort jeudi à Minneapolis dans le Minnesota, était un habitué des scènes et du public parisiens, pour qui il avait un attachement tout particulier.
- Au Bataclan "il a joué de 2h20 à 5 heures du matin !"
"Pour Prince il y avait deux villes importantes : Minneapolis et Paris", explique Philippe Manœuvre, le rédacteur en chef de Rock & Folk, sur Europe 1. "Paris, pour lui, c’était la ville où les Noirs étaient les bienvenus, où les Blacks pouvaient sortir quand ils voulaient, où ils voulaient", estime le spécialiste ajoutant que "c’est aussi à Paris qu’il a fait ses spectacles les plus déments, avec des "after show" légendaires".
Philippe Manœuvre se souvient particulièrement d'un concert de deux heures au Zénith après lequel le chanteur avait invité le public à le rejoindre au Bataclan : "Il y avait joué de 2h20 à 5 heures du matin !".
" On se retrouvait aux Bains douches, au Bataclan, au Rex Club "
Tous ceux qui ont côtoyé Prince lors de ses passages à Paris se souviennent de ses "after shows" devenus mythiques. Pour Pat Angeli, animateur sur la radio musicale RFM, il y avait toujours un mystère autour du lieu de l’"after show" quand Prince était à Paris. "On se retrouvait à 1 heure, 2 heures du matin dans un lieu tenu secret. Il appelait la maison de disques, disait "je veux une guitare, une batterie" et on se retrouvait aux Bains douches, au Bataclan, au Rex Club, au New Morning. Quand on sortait, le jour était levé".
Olivier Cachin, qui a écrit une biographie de Prince, se rappelle lui aussi ces moments privilégiés avec le "Kid de Minneapolis". "Moi j’ai un souvenir du Bataclan où il devait commencer à 1 heure du matin, mais il n’a commencé qu’à 3h30 à cause d’un problème technique. Tout a été reconfiguré pour qu’il puisse faire son concert. Finalement, il a joué jusqu’à 5h30 du matin !". Le journaliste évoque aussi le dernier concert de Prince qu’il a vu en France : "c’était à la Cigale, juste après deux performances au Grand Palais et il a joué pendant trois heures !", raconte-t-il sur Europe 1.
- Nuit magique au New Morning
En juillet 2010, ce grand ambassadeur de la musique noire, fils d'un pianiste de jazz et d'une chanteuse, a fait vibrer le New Morning, haut lieu parisien du jazz, où il s'était déjà produit en 1986 et 1987. Prince avait débarqué en pleine nuit, après avoir assisté à un concert de la chanteuse soul Erykah Badu à l'Olympia. "Il venait souvent écouter, et recruter au New Morning. C'était quelqu'un qui savait vraiment écouter les autres musiciens", explique la patronne Catherine Farhi.
Le club de 500 places affichait évidemment complet, avec des fans collés aux portes à l'extérieur pour tenter de grappiller quelques notes de musique. Certains des heureux élus, à l'intérieur, étaient venus le matin, dès que l'annonce de ce concert nocturne avait été lancée.
Sur scène à 2h30 du matin, avec l'une de ces tenues de scène extravagantes qu'il appréciait, il n'avait quitté la scène que vers 6 heures, le sourire aux lèvres : "Parfois, il se mettait sur le côté et laissait jouer ses musiciens. Il y avait dans ces soirées-là une liberté, c'était vraiment un feu d'artifice, avec ses chansons mais aussi des reprises de jazz. On voyait que c'était le bonheur du musicien, il n'était pas en promo", se souvient Catherine Farhi.
- Un concert en scène centrale à Bercy
L’attachement de Prince pour Paris et plus largement pour la France, s’est traduit aussi à travers sa musique. Dans Girls and Boys, de l'album Parade sorti en 1986, on entend quelques paroles chantées en français. Prince avait fait appel à Marie-France, une chanteuse et égérie du Paris des années 1970.
Selon la productrice, Prince projetait de se produire à nouveau sur les plus prestigieuses scènes parisiennes : "On était en train de préparer un piano voix avec lui. On devait le faire à l'Opéra Garnier, et ça a été reporté suite aux événements du Bataclan", a-t-elle confié sur Europe 1. "Là, subitement il m'a dit il y a deux semaines que je prépare la même chose, mais à Bercy, en scène centrale". "Quand je lui ai dit 'quand veux-tu le faire ?' Il m a dit 'soon' (bientôt) !", a ajouté la productrice, bouleversée.