Il était le dernier de la génération des pères fondateurs d'Israël à être en vie. Shimon Peres, trois fois ministre et président d’Israël de 2007 à 2014, s’est éteint dans la nuit de mardi à mercredi à l’âge de 93 ans des suites d'un accident vasculaire cérébral. Il restera dans l’histoire comme l’un des partisans de longue date d’une solution négociée à deux États avec la Palestine et Israël.
Un enfant polonais émigré à Tel Aviv. Shimon Peres est né en Pologne, à Vichnev. C’est à l’âge de 11 ans qu’il émigre avec ses parents à Tel Aviv. Il étudie à l’école agricole de Ben-Shemen avant de s’engager, en 1947, dans le Haganah, une organisation de défense des communautés juives. Il devient l’un des dirigeants de l’organisation. C’est à ce moment-là qu’il rencontre David Ben Gourion, le fondateur de l’Etat hébreu. "J’ai appris de mon maître David Ben Gourion à toujours préférer l’Etat au parti", aimait-il rappeler.
Avant la colombe, le faucon. Avant de devenir un artisan du dialogue israélo-palestinien, Shimon Peres fait ses premiers pas en politique dans les années 1950, teintant celle-ci d’un fort nationalisme. Nommé directeur général du ministère de la Défense israélien à 29 ans, il s'occupe principalement des achats d’armes du jeune État. Israël lui doit notamment ses puissantes entreprises d’armements et ses industries aéronautiques. Il lance également le programme nucléaire israélien – à la fois militaire et civil -, avec l’aide de la France. Au sein du Parti travailliste, il est alors affublé du surnom de "faucon". Puis, dans les années 1970, en tant que ministre de la Défense, il cautionne les premières colonies juives en Cisjordanie occupée.
Son parcours politique est ensuite marqué par un enchaînement de défaites électorales, aux législatives de 1977, 1981, 1984, 1988 et 1996. Mais cette image d’"éternel perdant" ne l’empêche pas d’occuper dans sa carrière de nombreuses fonctions ministérielles. Shimon Peres devient chef du gouvernement à deux reprises (1984-1986 et 1995-1996), mais aussi ministre des Affaires étrangères, de la Défense, des Finances, de l’Information, des Transports ou encore de l’Intégration.
Prix Nobel de la paix. Son principal fait d’arme date pourtant de 1994. Shimon Peres, alors ministre des Affaires étrangères remporte le Prix Nobel de la paix aux côtés du Palestinien Yasser Arafat et du Premier ministre israélien Yitzhak Rabin, un an après la signature des accords d’Oslo, considérés comme les premiers jalons d’une éventuelle réconciliation entre Israéliens et Palestiniens. Dès lors, il ne cesse de prôner un message de paix en faveur de la fin du conflit entre les deux peuples. D’où la création, en 1996, du Centre Peres pour la paix, visant à "bâtir une infrastructure de paix et de réconciliation par et pour les habitants du Moyen-Orient".
"Ce n'est pas moi qui ai changé. Je crois que la situation a changé. Tant que l'existence d'Israël était menacée, j'étais ce que vous appelleriez un faucon (...) Dès que j'ai senti que les Arabes étaient ouverts à la négociation, j'ai dit que c'était ce que nous préférions aussi", disait-il au magazine Time.
Peres, l’autorité morale. Shimon Peres est finalement élu président d’Israël en 2007, à l’âge de 84 ans. Une fonction avant tout protocolaire, à laquelle il rend néanmoins sa solennité, tranchant avec son prédécesseur, Moshe Katsav, contraint de démissionner après des affaires de viols et de corruption.
Malgré ses nombreux et ardents plaidoyers en faveur de la guerre menée à Gaza contre les islamistes du Hamas, l’image qui restera de ce mandat est sans doute cette accolade avec le leader palestinien Mahmoud Abbas, en 2014, sous les yeux du pape François.
Depuis la fin de son mandat, il était resté particulièrement actif à travers son Centre pour la paix, et ce malgré des problèmes de santé. Le 14 janvier dernier, il avait déjà été hospitalisé après un accident cardiaque qualifié de mineur. Ressorti de l'hôpital au bout de cinq jours, il y était retourné en raison d'une arythmie. Entre ces deux séjours à l'hôpital, Shimon Peres avait affirmé sa volonté de se "remettre au travail" et de "continuer à servir [ce] beau pays [qu’il] aimait tant".