Un hommage en pleine actualité. Après son film tourné en Afghanistan en juillet 2021 sur les derniers moments de Kaboul avant sa chute aux mains des talibans, le grand reporter Paul Comiti était retourné sur place trois semaines après le changement de régime et la mise en place d'une autorité islamique. Le journaliste est mort mi-janvier, et son dernier documentaire Retour à Kaboul sous émirat taliban est diffusé mardi soir à 22h50 sur Canal +. Dans la capitale afghane, il avait retrouvé la photoreporter française Véronique de Viguerie, déjà présente à ses côtés en juillet.
Un journaliste "très impliqué" et particulièrement sensible
La photoreporter raconte le compagnon de travail qu'était Paul Comiti au micro d'Europe 1. "C'était quelqu'un de très entier, qui ne laissait personne indifférent, et parfois difficilement gérable tellement il était impliqué dans son film. Parfois un peu à cran, un peu écorché vif, mais très drôle", affirme-t-elle dans l'émission Culture médias. "J'ai beaucoup appris à ses côtés", poursuit Véronique de Viguerie. "C'était quelqu'un qui se donnait entièrement, sans limite dans son travail."
La journaliste française se rappelle tout particulièrement de la sensibilité de Paul Comiti, à travers un épisode lors d'un tournage à Kaboul : "On avait rencontré des fillettes rescapées d'un attentat devant leur école, où elles avaient perdu plusieurs de leurs amis. A un moment, Paul s'est mis à pleurer et il n'arrêtait pas de s'excuser. Il était tellement pris par les émotions qu'il était ce genre de personnage à s'écrouler, plein d'empathie devant les malheurs que traversaient les autres".
Des talibans en opération de communication
À leur retour en Afghanistan, Paul Comiti et Véronique de Viguerie sont repartis à la recherche des témoins afghans qu'ils avaient rencontré à l'été 2021, et qui combattaient les islamistes. Parmi les éléments les plus étonnants du documentaire, les journalistes ont réussi à suivre des dirigeants talibans dans leur quotidien, y compris dans des moments de détente comme dans des manèges ou des restaurants. Des images d'autant plus étonnantes que les journalistes n'avaient pas pu s'approcher de ces même hommes lors de leur reportage tourné à l'été.
Un changement soudain de comportement auprès des journalistes occidentaux que Véronique de Viguerie explique par le fait que les talibans "étaient dans une campagne de séduction, en tout cas de communication, pour essayer de passer pour des gens tout à fait fréquentables par l'Occident". La photoreporter ajoute qu'il y avait "ce désir d'être légitimé et d'être vu comme des personnes avec qui on aurait pu imaginer des relations presque normales".
Le documentaire apporte néanmoins un recul sur cette volonté de "normalisation" de la part des talibans, notamment lorsqu'il s'agit du droit des femmes, particulièrement bafoué par le régime. Diffusé mardi soir sur Canal +, le film Retour à Kaboul sous émirat taliban est également disponible sur la plateforme de la chaîne MyCanal.