Ils seront 34. Jean-Marc Ayrault est entouré depuis mercredi de 17 femmes et 17 hommes, qui composeront son gouvernement. Qu'est-ce qui les attend maintenant ? Salaires, avantages, mode de vie… À quoi ressemble la vie d'un ministre ? Europe.fr fait le point.
À quoi servent-ils? Un ministre est l'agent gouvernemental d'un secteur donné (Économie, Éducation, Justice…). Il y gère donc les affaires courantes et est chargé de l'application des lois concernant son secteur. Il dirige et supervise les divers services de l’État relevant de son ministère, comme les employés de Bercy, du Quai d'Orsay ou les préfectures pour l’Économie, les Affaires étrangères et l'Intérieur. Voilà pour le texte.
"Mais cela va bien plus loin que ça", raconte Brigitte Girardin, Ministre de l'Outre-mer de 2002 à 2005 et ministre déléguée à la Coopération, au Développement et à la Francophonie de 2005 à 2007, contactée par Europe1.fr.
"Un ministre donne l'impulsion politique aux divers services d'un ministère. Il étudie le programme du chef de l'Etat élu (hors cohabitation), et donne les instructions. Il représente également la voix de la France et de l'Etat lors de ses rencontres et voyages. Un ministre travaille tout le temps, il a très peu de weekends, à peine un sur trois", se souvient-elle.
Comment se répartissent-ils les tâches? Le ministre dispose de "collaborateurs" : directeur de cabinet, chef de cabinet, directeurs adjoints, conseillers techniques etc. Ceux-ci assurent la transition entre les services du ministère et le ministre. Ils filtrent les informations qui remontent des services, constituent les dossiers, puis écrivent les projets de lois et les discours des ministres, qui valident ensuite et prennent des décisions en fonction.
Auparavant, le nombre de ces collaborateurs n'était pas fixé. Dans le gouvernement Ayrault, les ministres n'auront désormais plus que 15 collaborateurs et les ministres délégués 10.
Combien sont payés les ministres? Les ministres du gouvernement Sarkozy gagnaient autour de 14.000 € brut par mois, soit 10.800 € net. Un secrétaire d'Etat gagne environ 1.000 euros de moins, selon le ministère du Budget. Le Premier ministre gagnait lui environ 21.200 € brut, soit à peu près 16.200 net. Le député René Dosière, auteur d'une enquête sur le train de vie des ministres, évaluait à 17 millions d’euros par an en moyenne le coût généré par un ministre et son équipe. En 2011, dans le cadre du plan de rigueur, François Fillon avait annoncé un gel des salaires jusqu'à 2016. Les ministres ne devaient donc pas être augmentés d'ici là.
François Hollande a affirmé qu'il diminuerait de 30% le salaire des membres du gouvernement. Mais il n'a pas précisé s'il conservera le gel des salaires.
Logement de fonction. S'ils en font la demande, les membres du gouvernement peuvent être logés dans des logements dits "domaniaux" (appartenant à l'État, par exemple dans les locaux des ministères), ou dans le parc privé aux frais de l'État.
Face aux polémiques, une circulaire de Jean-Pierre Raffarin du 30 juin 2005 est venue renforcer les règles d'attribution des logements de fonction des ministres. Si le ministre est déjà propriétaire ou locataire d'un logement d'une superficie suffisante pour lui servir de résidence principale, à Paris ou en proche banlieue, l'État ne prend désormais plus en charge son loyer.
Les membres du gouvernement de François Hollande ne pourront en outre obtenir un logement de fonction dans le privé que si aucun logement domanial n'est disponible. Et même dans ce cas, l'État n'assumera la location que d'un appartement de 80m², plus 20m² par enfant : au-delà, le ministre devra payer de sa poche.
Frais professionnels. François Hollande n'a pas évoqué ce point durant la campagne. Jusqu'à aujourd'hui, le Premier ministre définit par décisions individuelles une allocation mensuelle pour "frais d'emploi" à chaque ministre. Celle-ci est au moins égale à l'indemnité représentative de frais de mandat des parlementaires, soit 5800 euros. Comme celle allouée aux parlementaires, cette allocation n’est pas soumise à l’impôt sur le revenu et aux cotisations sociales obligatoires.
Avantages en nature. Pour les déplacements, les ministres disposent de voitures avec chauffeur, dont le nombre varie selon le ministère. Les "petits" disposent généralement d'une seule voiture avec chauffeur. Quelques collaborateurs haut placés de leurs cabinets peuvent également en avoir une.
Pour les "gros", cela peut être bien plus. Selon René Dosière, François Fillon disposait par exemple de 6 voitures et 4 chauffeurs, et son cabinet de 17 véhicules et 13 chauffeurs. Pour l'anecdote, c'est le ministère de l'Ecologie qui en disposerait le plus. Jean-Louis Borloo avait ainsi 7 voitures, et son cabinet 47. Le ministre et ses collaborateurs avaient également 34 chauffeurs pour les conduire.
Les ministres ont aussi un accès gratuit au réseau SNCF (en 1er classe) et des quotas de déplacements en avion. "La plupart du temps, on utilise des lignes comme Air France. Le quota dépend de chaque ministère. Il est également possible d'emprunter les avions du gouvernement. Mais cela se fait au cas par cas, selon le type et l'urgence du déplacement, et sous autorisation de Matignon", détaille Brigitte Girardin. Ces "avantages en nature" ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu ni aux cotisations sociales obligatoires.
Jean-Marc Ayrault a toute fois annoncé une diminution des frais de cabinet de 10%. De plus, la charte de déontologie signée de tous les nouveaux ministres impose par écrit que "seules les dépenses directement liées à l'exercice des fonctions sont prises en charge par l'Etat". Elle interdit également les cadeaux et invitations privées, insiste sur le fait que les ministres doivent se déplacer en train autant que possible, et impose une série de mesures pour lutter contre les conflits d'intérêt. Les ministres doivent selon elle publier une déclaration d'intérêts, confier la gestion de leur patrimoine mobilier à un intermédiaire agréé, "sur la base d'un mandat garantissant qu'ils ne pourront intervenir directement dans cette gestion", renoncer à toute participation à un organisme, même à but non lucratif, dont l'activité intéresse leur ministère et, aussi, s'abstenir "absolument de toute intervention concernant la situation d'un membre de leur famille ou d'un proche".
Gardes du corps. La sécurité des membres du gouvernement est assurée par le Service de protection des hautes personnalités (SPHP). La plupart des ministres était jusqu'alors entourée de deux officiers de sécurité, qui protègent leur ministre à tour de rôle. "Mais les ministres les plus susceptibles d'être menacés, comme l'Intérieur ou la Défense, en ont bien plus. Moi-même lors de déplacements jugés dangereux, comme à Haïti ou Abidjan, je pouvais être accompagnée des deux en même temps" se rappelle Brigitte Girardin. La sécurité des ministres de l'Intérieur et de la Défense est par exemple prise en charge par une vingtaine de policiers.
Toutefois selon le journaliste d'iTélé Michaël Darmon, qui cite une source policière, François Hollande aurait demandé à ce que les ministres délégués et secrétaires d’État n'aient plus d'officiers de sécurité.
"Retraite chapeau". Lorsque les ministres quittent le gouvernement, ils perçoivent leurs salaires pendant six mois. De plus, le Premier ministre bénéficie à vie d’une voiture avec chauffeur, d’une secrétaire et d’un garde du corps. Une protection rapprochée chiffrée par la Cour des comptes à plus de 71 800 euros par an.
D'autres ministres d'Etat comme ceux de l’Intérieur, de la Justice, de la Défense, ou encore, des Affaires étrangères peuvent également bénéficier de tels privilèges, mais aucun texte ne régit leur attribution pour le moment.