L’INFO. On ne lui avait rien demandé. Avant de partir en vacances, François Hollande avait ordonné à ses ministres de réfléchir à "la France de 2025". A ses ministres, seulement. Mais mardi, Martine Aubry s’est fendue d’une longue tribune dans Le Monde dans laquelle elle explique sa vision de la France de demain. Une prise de parole qui sent bon le discours de politique générale. Et doit lui permettre de revenir au centre du jeu politique.
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Un retour sur la scène socialiste. Samedi dernier, Martine Aubry a fait une apparition plus que remarquée à l’université d’été du PS à la Rochelle. Sa première apparition à un événement socialiste depuis dix mois. Et la maire de Lille a été copieusement applaudie, sans même prendre la parole publiquement. Un retour réussi, qui lui a peut-être donné des ailes. Deux jours plus tard, l’ancienne patronne de la rue de Solferino a en effet décidé d’intervenir médiatiquement pour partager sa vision de la France.
"Pleinement solidaire du gouvernement", mais… Blessée de ne pas avoir été nommée à Matignon, Martine Aubry s’est retranchée à Lille, mutique. François Hollande apprécie la loyauté de celle qui, malgré tout, n’a jamais essayé de jouer contre son camp. Il appréciera certainement moins la tribune de son adversaire à la primaire socialiste de 2011, même si elle se dit, dès la troisième ligne, "pleinement solidaire du gouvernement qui, avec courage, s’attelle au redressement du pays". Car quelques phrases plus loin, la première critique tombe : "l'heure n'est plus au rafistolage : nous avons la responsabilité de faire émerger un monde nouveau", assène-t-elle, comme pour intimer au président d’aller plus loin, plus vite, plus fort. "A chaque ligne, soit elle nous file un taquet, soit elle se pousse du col" tonne un conseiller du président, joint par Europe1.
"Arrêtons le défaitisme". Jean-Marc Ayrault a développé un concept, qu’il a martelé dans toutes ses interventions médiatiques : "le nouveau modèle social français". Martine Aubry a aussi le sien : "la renaissance", qu’elle décline à toutes les sauces. "La renaissance" sera d’abord industrielle, estime-t-elle, avant de lister les raisons d’y croire : "l'énergie ? Qui pourrait dénier à la France, qui a été championne dans le domaine énergétique, la capacité de devenir un fer de lance mondial dans le solaire, l'éolien et le géothermique ! La santé ? Nos chercheurs sont à la pointe de l'innovation médicale. Les villes de demain, à la fois durables et mixtes ? Nous détenons toutes les compétences de l'urbanisme et de l'architecture jusqu'au traitement des déchets, au transport, à l'énergie, en passant par l'écoconstruction." Un optimisme qui fait dire à la maire de Lille : "arrêtons le défaitisme".
Renouer avec l'Europe. Outre la relance de la politique industrielle française, Martine Aubry ouvre d’autres perspectives, notamment écologique, pour le plus grand plaisir de son amie Cécile Duflot. La pro-européenne convaincue qu’elle est rappelle également à François Hollande son engagement de réorienter l’Union européenne vers la croissance, histoire d’en finir avec "les politiques d’austérité de ces dernières années", qualifiées de "mortifères". "L’Europe devrait être, comme le dit si bien, Jacques Delors, la compétition qui stimule, mais aussi la coopération qui renforce, la solidarité qui unit", estime celle pour qui "le nouveau monde passe par l’Europe, mais aussi par une France écoutée et respectée".
Parce qu’elle rêvait de devenir ministre de la Culture à défaut d’obtenir Matignon, Martine Aubry finit sa tribune par cette thématique qui lui est chère. "Il n'est pas pour moi de grand projet politique sans ambition culturelle", s’emporte-t-elle, espérant "pour la France une renaissance culturelle, généreuse, comme chaque alternance en a produit, en 1936 comme en 1981." Aurélie Filippetti appréciera. François Hollande, peu porté sur la chose, un peu moins.