Vendredi à 13 heures, Bertrand Delanoë s'est présenté à la grille du palais de l’Elysée. Le maire de Paris était attendu pour déjeuner à la table du Président. Une rencontre en tête-à-tête qui ne figure pas à l’agenda officiel de François Hollande. Il s’agit là de la même configuration que le déjeuner Hollande-Aubry de la semaine dernière, que la maire de Lille avait ostensiblement fait fuiter, précisant au passage qu’elle ne faisait que répondre à l’invitation du Président. Deux "premier ministrables" reçus à l’Elysée en dix jours, voilà de quoi donner des sueurs froides à Jean-Marc Ayrault. D’autant que ces deux ténors du PS ne sont pas les seuls que le chef de l’Etat reçoit.
Fabius et Valls aussi sur les rangs. Ainsi Laurent Fabius. En fin politique, l’ancien Premier ministre s’est habilement remis dans le jeu. Ses tête-à-tête avec le Président, rendez-vous de routine pour évoquer les questions de politique étrangère, figurent bien à l’agenda officiel. Mais le ministre des Affaires étrangères prend bien soin de préciser que "naturellement, nous évoquons ensemble tous les sujets". Relancé par les journalistes, le ministre, énigmatique, ajoute : "vous comprenez que je doive garder sur nos conversations le plus grand secret". Enfin, "last but not least", Manuel Valls, régulièrement reçu en sa qualité de ministre de l’Intérieur, se prépare lui aussi. Un de ses amis affirme ainsi que "Manuel consulte beaucoup en ce moment, il demande à ses proches de se tenir prêt au cas où".
Ayrault, l’inefficace baroud d’honneur. Bref depuis la crise "Léonarda", la mise en concurrence des successeurs potentiels de Jean-Marc Ayrault, parfaitement orchestrée par l’Elysée, semble confirmer que le bail de l’actuel Premier ministre pourrait prendre fin après les élections européennes de mai 2014.
Certains socialistes lisent d’ailleurs l’initiative d’Ayrault sur la "remise à plat de la fiscalité" comme une tentative de reprendre la main, de se donner un peu d’air. Une tentative vite contenue par François Hollande, qui a lui-même précisé que ce chantier prendrait "la durée du quinquennat", le déliant ainsi du sort de son actuel premier ministre. Car François Hollande avait annoncé, dès l’été 2012, dans un reportage diffusé sur France 2, qu’il ne garderait pas Jean-Marc Ayrault jusqu’au terme de son mandat.